Chaque nuit, les Fantômes de cette Société tragilibérale lui rendent visite pendant son sommeil ou lors de ses fréquentes intoxications. Alan Beffroi va régulièrement à leur rencontre pour les écouter comme il se doit, mais leurs discours sont souvent consternants. En effet, ces esprits serviles ne savent même pas qu’ils sont morts. Quoi ? Ha ha ! Vous n’étiez pas immortels, pauvres larves crédules, mais qui donc vous a mis cette putain d’idée en tête ? Quand Alan est soul et défoncé, il a tendance à croiser ou parler à beaucoup d’êtres qui n’existent plus, qui ne sont pas encore nés, ou à des personnages fictifs qui sortent tout droit des contes qu’il a inventés. On le voit titubant, déséquilibré, grommelant, parlant tout seul, comme les poivrots ou les crackés accrochés à leur portable imaginaire, avec au bout du fil un interlocuteur mort depuis 143 ans (il s’agit souvent d’un Communard vexé d’avoir été bêtement abattu par un Versaillais mieux entraîné), alors Alan se reprend, regarde autour de lui : c’est OK, personne ne m’a surpris en train de délirer, je suis fou ? Et quelques minutes plus tard il se met à hurler des insanités dans les rues froides ! Quand il se perd dans la nuit artificielle on a souvent l’étrange impression qu’il se dédouble : d’après ce qu’affirment certaines de ses connaissances, on aperçoit parfois les deux Beffroi marchant bras dessus bras dessous en dansant, en criant au clair de la Lune avorteuse, défonçant des poubelles en chantant, se signant devant des vitrines derrière lesquelles copulent des corps-athées sexys mais dépourvus de peau.
A suivre...
(image : Double Self Portrait, Schiele)