Le racotier

Publié le 30 janvier 2015 par Journalvernois

Encore un métier que j’ai vu disparaitre celui de racotier .Tous les anciens que j’ai questionné à ce sujet se souviennent du racotier. D’où vient ce nom? je n’en sais rien. Est-ce un mot déformé par le patois régional? existe-t-il un mot dans le dictionnaire pour le définir? je ne sais pas non plus. Si quelqu’un peut me renseigner …….
Le racotier était un commerçant qui passait régulièrement dans les hameaux, les fermes , les locateries au volant ce sa camionnette, où il était susceptible de trouver des produits fermiers et de la volaille. C’était le domaine de la fermière. il avait ses maisons attitrées, où il achetait oeufs, poulets, poules, pintades, lapins, les chevreaux au moment de Pâques,les oies à la Toussaint, les dindes pour Noël. Le cas échéant il pouvait acheter des fromages ou du beurre. Il payait cash mais était filou, essayait d’acheter toujours au plus bas. Il fallait négocier. La fermière ne manquait pas de lui faire savoir que le racotier qui passait sur le secteur voisin pratiquait des tarifs plus intéressants. Il alignait ses prix de peur de voir sa fournisseuse partir à la concurrence.
Celui qui passait chez nous était un oncle qui vivait au Creusot (71) aussi il m’est arrivé d’aller plusieurs fois chez lui. Il abattait les volailles achetées le jour même dans une construction sommaire située derrière le magasin. Elle tenait plus de la cabane de jardin que de l’abattoir aseptisé agréé par les services de l’état et de Bruxelles. L’oncle était équipé pour saigner, plumer, éviscérer. C’était normal pour l’époque. Le lendemain ma tante mettait en vente dans son magasin. (l’épicerie des 4 chemins, pour ceux qui ont connu) Le client ne se posait pas de questions. Il achetait des produits fermiers (j’insiste sur le mot) extra frais,et totalement naturels. Aujourd’hui on dirait « bio » mot encore inusité voire inconnu à cette époque. Même si l’hygiène recommandée à heure actuelle et soit dit en passant pas toujours efficace, n’était carrément pas respectée,les habitués de l’épicerie bénéficiaient d’un produit que je pourrais presque qualifier de « haut de gamme ». Aujourd’hui le même produite est réservé à une clientèle aisée.
Le racotier était sans aucun doute le champion de ce qu’on appelle la vente en circuit court. Aujourd’hui certaines personnes recherchent ce mode de vente. Lassés des produits alimentaires normalisés,aseptisés, trafiqués, les consommateurs sont en fait demandeurs de ce que le racotier proposait il y a 50 ans. On n’invente rien. C’est un commerce qui reste encore marginal mais qui est en progression grâce, en partie à internet. Des exploitants agricoles l’ont bien compris et ils sont de plus en plus nombreux à se mettre à la vente directe de produits plébiscités par le consommateur. C’est relativement facile pour les fruits et légumes. Pour les produits laitiers et la viande et ses dérivés le respect des normes actuelles demande de lourds investissements.
Le dernier racotier que j’ai connu dans les années 60 et début 70 faisait très fort. Il venait à la ferme avec une Estafette Renault. Il ne se contentait pas de racoter, il vendait de l’épicerie de première nécessité. Les produits étaient présentés dans des rayonnages installés dans la partie arrière du fourgon. La porte latérale s’ouvrait sur un grand caisson compartimenté occupant la partie avant du fourgon, destiné à recevoir les volailles achetées en ferme. Imaginez la sanction si un commerçant était pris à pratiquer une telle activité aujourd’hui !

A bientôt