L'heure des choix A la fin du tome 2, Alice Scarling nous laissait avec une Sascha en bien mauvaise posture. Dans Agnus Dei, elle fait preuve de clémence envers ses lecteurs en reprenant le récit à l’endroit même où elle l’avait laissé. Finis néanmoins le comique de situation à tout va et les pirouettes heureuses pour se sortir in extremis d’un mauvais pas, il s’agit là clairement du tome le plus sombre de la trilogie. L’Apocalypse est imminente et les événements de la fin du tome 2 ont opéré un revirement dans la personnalité de Sascha qui, bien que toujours à fleur de peau, est devenue craintive et taciturne. Elle intériorise la grande majorité de ses émotions, dont seul le lecteur a désormais la primeur, ce qui donne lieu, vous vous en doutez, à de nombreux malentendus avec ses acolytes.
Parlons-en, d'ailleurs, de ses acolytes. Sans surprise, Alice Scarling réunit les deux compagnons de Sascha, Raphaël et Zekiel, ce qui, bien sûr, ne fait qu’embrouiller les idées de l’héroïne déjà bien amochée. Après avoir goûté aux deux, la voilà maintenant obligée de faire un choix (pour ma part, j’ai une préférence pour Zekiel, mais après avoir discuté à quelques lectrices, il s’avère que Raphaël a aussi son nombre d’admiratrices).
Mais la nouveauté de ce tome 3, c’est l’arrivée d’un nouveau personnage, et pas des moindres, puisqu’il s’agit du fils de Dieu. Attention, oubliez le Jésus chaste et barbu que vous connaissez, Alice Scarling revisite le mythe à sa sauce. Ici, le fils de Dieu s’appelle Kevin (non, ça n’est pas une blague), il est gay et travaille comme stripteaseur dans un club SM. C’est ce qu’on appelle une réinterprétation.
Côté intrigue, l’Apocalypse prend un tour inédit et la mission se corse à mesure que Sascha voit ses certitudes balayées les unes après les autres par des révélations surprenantes. Le passé de Sascha, tout comme celui de Raphaël et Zekiel, se désépaissit, et la division du monde entre Ordre et Chaos n’est plus si évidente que cela.
Si je ne devais émettre qu'une réserve, ce serait sur la fin, trop rapide à mon goût par rapport au reste du roman tout en développement. J'ai également trouvé les différents choix de Sascha curieusement faciles comparés à ses hésitations maladives tout au long des trois tomes.
Hormis ce petit couac, la trilogie est un sans faute. Avec son style nerveux, son humour très présent et son intrigue originale, Alice Scarling parvient à nous tenir en haleine et à nous emporter dans son univers singulier. A découvrir de toute urgence.
Requiem pour Sascha, tome 3 : Agnus Dei d’Alice Scarling, 2015, Milady, 379 pages