Avec quelques paroissiens, nous avons monté un petit groupe de catéchèse commun aux paroisses du doyenné. Nous formons un petit groupe relaxe de chrétiens-parents-débordés comme dit le Curé de la paroisse qui nous accueille. Pour la prochaine fois, il nous a demandé un travail préparatoire ; il a osé demander ça à des parents débordés ! Il nous a demandé de choisir nos 10 versets préférés de l’Évangile. Je me suis dit que c’était une belle occasion, ou un beau prétexte pour une relecture intime de quelques phrases qui me touchent particulièrement.
Pour les citations, j’ai pris deux versions différentes : en gras la Bible de Jérusalem, en italique, ensuite, la nouvelle traduction officielle liturgique « Copyright AELF – Paris – 1980 – Tous droits réservés ». La Bible de Jérusalem d’abord, parce que c’est la petite bible de poche, que j’ai depuis le collège (fourniture scolaire dans l’enseignement libre) et que je trimballe assez facilement partout et la Nouvelle traduction officielle ensuite parce que ma femme vient de me l’offrir (dans une belle édition en cuire) comme cadeau de naissance pour #babyboy. C’est un beau geste d’ouverture pour une femme qui ne croit pas… Alors du coup, je tiens à ces deux traductions !
Le prêtre n’ayant pas précisé dans quel Évangile il fallait chercher, j’ai pioché indifféremment dans les quatre et comme je ne sais pas me limiter et qu’avec la Bible, on en veut toujours plus (un petit peu plus), voici mes onze versets préférés :
Marie dit alors : « je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta parole ! » Et l’ange la quitta.
Lc 1, 38
Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » Alors l’ange la quitta.
En tout premier lieu, ce « oui » de la Sainte Vierge est sans doute pour moi l’un de mes passages préféré de la Bible. Ce oui à Dieu, ce oui au mystère, ce oui à la transcendance. Ce oui, est également le oui de la confiance. C’est aussi le saut de la foi dans l’inconnue. Que savait Marie de ce qui allait arriver ? Pouvait-elle seulement imaginer ce dessin divin qui prendrait chaire en son sein ? C’est pour cela que j’avais proposé ce récit de l’annonciation comme Evangile pour notre mariage. Une seconde raison à choix de cet Évangile pour un mariage avec une femme qui n’a pas la foi (et à qui les histoires de Jésus ne parlent pas forcément des masses), c’est que ce grand saut dans l’inconnu, ce oui donné avec confiance est également compréhensible de manière profane comme le oui que des fiancés se donnent le jour du mariage : un oui qui nécessite de se faire confiance pour affronter la vie à deux (et plus…) et un oui qui est aussi un saut dans l’inconnu de notre vie de couple, de parents…
Ici, dans le contexte d’une lecture de nos versets préférés, j’aime aussi à voir dans ce oui situé au premier chapitre de l’Evangile de Luc, un oui à l’invitation que la Christ veut nous faire de lire l’Évangile, un oui à me laisser toucher et habiter par cette parole vivante. Ou plutôt un oui à accepter par avance les transformations que l’Esprit Saint voudra bien faire en mon cœur à la lecture de l’Évangile.
Mais l’ange leur dit : « Soyez sans crainte, car voici que je vous annonce une grande joie, qui sera celle de tout le peuple »
Lc 2, 10
Alors l’ange leur dit : « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple »
Plusieurs fois dans l’Évangile, l’ange dit de ne pas avoir peur (Lc 1, 30, Mc 16, 6). Cela est un peu déroutant à première vue. Pourquoi aurions-nous peur de voir un ange ? Ne les imaginons-nous pas comme de merveilleuses créatures ? Alors c’est là une première leçon qui nous est donnée ici : la vision de la pureté angélique devrait nous faire sentir à quel point nous en sommes loin… il y a donc besoin de ce message d’accueil de la part de l’ange d’être sans crainte ! D’une certaine manière, nous, créatures, ne pouvons-nous présenter devant le créateur sans y être invité (voir à ce sujet la théophanie du buisson ardent par exemple).
Enfin, l’ange du Seigneur vient proclamer une bonne nouvelle pour tout le peuple… voilà ici aussi une nouvelle ouverture de l’Évangile, au moment de la nativité : un sauveur nous est né. Voilà une grande joie que celle du mystère de l’incarnation. Cet enfant Jésus, quand on sait toute la fragilité d’un enfant, s’est bien donné pour nous, fragile parmi les fragile, petit parmi les petits, l’un de nous parmi nous.
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu
Mt 5, 8
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu.
Cette pureté du cœur me touche particulièrement car elle me semble ouvrir toute la lecture évangélique. Et elle ouvre à voir Dieu ! Promesse d’une vision de Dieu à la fin des temps, mais, plus humblement, de voir la marque du créateur dans la beauté du monde, de voir la marque du Seigneur dans chacun de nos frères, de voir la marque du Paraclet dans bien des sourires, bien des mains tendues, bien des mots d’amour et de réconfort…
Demandez et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira.
Mt 7, 7
Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira.
En écho au oui marial que j’ai commencé par citer plus haut, ce verset évoque tout particulièrement pour moi la confiance que nous pouvons mettre en Dieu notre Sauveur. Ce verset est pour moi une véritable école de prière… de savoir s’en remettre avec confiance à notre Père dans les cieux. J’ai toujours envie, également, d’ajouter une quatrième articulation à ce verset que pourrez être « écoutez et vous entendrez » comme école de lecture (d’écoute) de la parole de Dieu.
Je vois là une forte résonance, et un écho entre la parole de Dieu et ma prière… qui doit se faire écoute et accueil de la parole de Dieu pour qu’elle me donne ce dont j’ai besoin et, qu’au final, il me soit fait « selon sa parole ».
Alors Jésus fixa sur lui son regard et l’aima. Et il lui dit : « une seule chose te manque : va, ce que tu as, vends-le et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel ; puis, viens, suis-moi. »
Mc 10, 21
Jésus posa son regard sur lui, et il l’aima. Il lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; alors tu auras un trésor au ciel. Puis viens, suis-moi. »
La version de Saint Marc de se verset s’ouvre par le Christ qui fixe son regard (sur le jeune homme riche) et qui l’aime. En cela je me dis que toute éducation doit être en tout premier lieu fondée sur l’amour : un reproche, un conseil… peu importe pourvu qu’il soit dit avec bienveillance, c’est-à-dire aussi en tenant compte de la personne que j’ai en face de moi.
Cette introduction de ce verset souligne également, de manière plus « religieuse », que l’amour de Dieu est premier, est toujours premier. Et que c’est par amour que le Seigneur nous invite à le suivre, pour répondre à son amour.
Enfin, dans ce verset, qui m’évoque la merveilleuse encyclique Veritatis Splendor de Jean-Paul II est un véritable programme de conversion intérieur : savoir se dépouiller (heureux les pauvres de cœurs) pour être disponible et suivre le Christ.
Jésus leur dit : « En vérité, en vérité, je vous le dit, avant qu’Abraham existât, Je Suis. »
Jn 8, 58
Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : avant qu’Abraham fût, moi, JE SUIS. »
Voici une très forte affirmation de la divinité du Christ. La formulation renvoie tout particulièrement à l’appel de Moïse (Je Suis celui qui Suis) et, outre le fait d’avoir sans doute été pour ses détracteur une des plus scandaleuse affirmation qu’il ait pu faire, elle me touche tout particulièrement car elle souligne la transcendance divine qui est donc également une caractéristique du Rédempteur. En cet homme qui vécut il y a 2000 ans est de toute éternité présent la transcendance de Dieu qui fait échos au prologue de l’Évangile de Saint Jean (au commencement était le Verbe…). Je préfère ce verset car il est dit d’une manière qui, je trouve, concrétise le mystère de l’Incarnation. Il y a une véritable présence charnelle du Christ qui dit « Je Suis ».
afin que tous soient un. Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu’eux aussi soient un en nous, afin que le monde croie que tu m’as envoyé.
Jn 17, 21
Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé.
Pour jouer le jeu du choix d’un verset, je me fais violence et je coupe une partie de la magnifique prière sacerdotale… il faudrait presque tout prendre dans ce chapitre 17 de Saint Jean. Un verset seulement, alors je prends celui de l’unité. Aussi parce qu’il résonne toujours très fortement en moi et me renvoie aussi à la question du pourquoi avoir souhaité ajouter ma voix (mon blog), à la déjà très riche cathosphère ; parce que je trouvais trop de propos clivant sur internet, tout particulièrement dans la période de la « Manif pour Tous » entre les pro et les anti, entre les pour et les contre, entre les uns et les autres. Qu’il y ait du débat, cela est sain, mais il y a trop souvent une façon de vouloir « dominer l’autre » dans la discussion (ce j’ai raison et tu as tort qui fait tant de mal). Je préfère une discussion qui soit bienveillante (j’ai une idée et je te la donne, tu as une idée et je la reçois et je la laisse murir et féconder mon cœur). C’est à mon avis un enjeu important à l’heure d’internet de penser l’unité (non pas l’uniformité) dans une démarche de bienveillante créativité.
C’est à ce prix-là que nous pourrons vraiment montrer un visage joyeux sur la toile, un visage d’une cathosphère aimante (qui aime et qui attire comme un aimant).
Jésus lui répondit : « Si j’ai mal parlé, témoigne de ce qui est mal ; mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? »
Jn 18, 23
Jésus lui répliqua : « Si j’ai mal parlé, montre ce que j’ai dit de mal ? Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? »
C’est un peu difficile d’expliquer pourquoi ce verset me parle plus que beaucoup d’autres. Parce que je trouve qu’il nuance, met en perspectives certaines interprétation que je trouve trop « lénifiantes » du pacifisme de Jésus (« À celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue. » Lc 6, 29) ou, de l’autre côté du spectre, ceux qui (sur)interprètent la scène où le Christ chasse les marchands du temps (Jn 2, 13-16).
La défense doit être fondée sur la recherche de la vérité, de la justice. Je trouve là une lecture positive de la vie en société où il ne s’agit pas tant de s’imposer que de ne pas s’écraser. Encore une fois, les textes bibliques doivent être lus en cohérence les uns avec les autres ; aussi, l’affirmation de ses droits ne doit pas se faire au mépris de ceux des autres.
J’aime beaucoup ce verset parce que je trouve qu’il donne une vraie lecture de la mesure de la justice.
Mais il leur dit : « Ne vous effrayez pas. C’est Jésus la Nazarénien que vous cherchez, le Crucifié : il est ressuscité, il n’est pas ici. Voici le lieu où on l’avait mis. »
Mc 16, 6
Mais il leur dit : « Ne soyez pas effrayées ! Vous cherchez Jésus de Nazareth, le Crucifié ? Il est ressuscité : il n’est pas ici. Voici l’endroit où on l’avait déposé. »
Chez Luc les anges disent « Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? » (Lc 24, 5). J’aime bien également cette formulation ; mais entre les deux il me fallait choisir pour m’en tenir à l’exercice de 10 versets. Ce message de l’ange qui semble comme répondre à la promesse de l’Annonciation et à l’annonce de la Nativité du Seigneur est l’autre grand mystère de l’Évangile : l’annonce de la résurrection du Christ. C’est là le deuxième pivot de notre foi car, comme le dit Saint Paul : «si le Christ n’est pas ressuscité, notre proclamation est sans contenu, votre foi aussi est sans contenu» (1Co 15, 14). Voici dans toute sa splendeur l’annonce d’ « une grande joie, qui sera celle de tout le peuple » (Lc 2, 10). Oui, le Christ est ressuscité !
Dans ce texte de l’annonce de la résurrection, j’aime beaucoup cette présence de l’ange auquel je suis sensible et ce vide. Le tombeau est vide. Ce vide qui est là comme pour être tout entier rempli de notre foi, de notre adhésion à ce mystère. Alors que les femmes ne voient rien, elles n’ont que le vide (et l’ange), pour croire, pour, elles aussi risquer le «oui» de la foi. Et nous avec elles.
Il lui dit pour la troisième fois : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Pierre fut peiné de ce qu’il lui eût dit pour la troisième fois : « M’aimes-tu », et il lui dit : « Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime. » Jésus lui dit « Pais mes brebis. »
Jn 21, 17
Il lui dit, pour la troisième fois : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Pierre fut peiné parce que, la troisième fois, Jésus lui demandait : « M’aimes-tu ? » Il lui répond : « Seigneur, toi, tu sais tout : tu sais bien que je t’aime. » Jésus lui dit : « Sois le berger de mes brebis. »
Trois demandes consécutives pour répondre aux trois trahisons lors de la nuit de la passion ; trois demandes qui sont aussi trois portes ouvertes pour accueillir le pénitent. L’amour et la miséricorde du Seigneur sont plus forts que toutes nos faiblesses. Je trouve ce dialogue très délicat et que l’on peut y lire une grande douceur du Christ.
Je trouve que toute la bienveillance du Rédempteur se retrouve là, dans ce verset (même si on peut la voir à bien d’autres endroits…).
Et il leur dit : « Allez dans le monde entier, proclamez l’Évangile à toute la création. »
Mc 16, 15
Puis il leur dit : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. »
Parce que l’exercice était trop difficile, le onzième verset que j’ai choisi est l’un des tout derniers de Saint Marc, l’envoi de ses disciples en mission. Après avoir accueilli la bonne nouvelle, après s’être laissé embraser par l’amour qui vient de Dieu, notre façon de répondre à cet amour c’est de la partager, d’aller dire autour de nous, aux périphéries que le Seigneur est vivant, qu’il fixe son regard sur toi et t’aime, et que si tu le veux, tu peux dire oui et le suivre… alors tu auras un trésor dans le ciel.