Magazine Humeur
Une mort annoncée... Gatien Moisan
Publié le 25 mars 2015 par OrageGatien Moisan
Devant l’inéluctable il se tient debout. N’a-t-il pas fait cela toute sa vie? Il la regarde en face, l’esprit plus lucide que jamais.
- Tiens, te voilà toi.
- …..
Se tait la grande faucheuse
- Tu arrives un peu tôt, non?
- Il est plus tard que tu ne penses.
L’amitié se fout du temps. Elle naît dans la complicité, la confiance et s’installe dans le cœur pour ne jamais en partir. L’amitié, c’est une histoire d’amour entre personnes qui se reconnaissent et se choisissent. Et passent les années. Le lien se tisse au fil des souvenirs. On finit par croire que la source du fil qui nous lie l’un à l’autre est sans fin. Il l’est. Oh! Oui. Il l’est dans le sentiment. Mais il fera quand même très froid, là, dans cette absence qui va suivre ton départ.
Les nœuds de ma gorge sont tellement serrés depuis que j’ai appris la très mauvaise nouvelle. Ton cerveau si génial, si ordonné, si créatif est envahi par un crabe mortel. Et toi, l’artiste mathématicien, le perfectionniste des formes géométriques, l’apôtre de la règle d’or, tu ris de te savoir bientôt à la merci du désordre.
- Moi, qui étais toujours si mathématique, je vais devenir tout désordonné, me dis-tu de l’autre côté de la ligne téléphonique.
Et ton rire continue de couler sur ma peine.
Jusqu’à ce que je découvre cette photo de toi. Cette photo qui gifle ton destin. Cette photo à la fois terrible et sublime. Une fosse. Toi étendu au fond tandis que les racines s’étirent par-dessus ton corps immobile.
© Photo Gatien Moisan
Devant l’inéluctable, l’artiste s’empare de son destin. N’as-tu pas fait cela toute ta vie? Tu le regardes et le défies… L’art est ton rempart. Te voilà confronté à la toile noire de ta fin de vie et toi, Gatien Moisan, sous nos yeux ébahis, tu es en train d’en faire une œuvre d’art.
Te connaissant, tu vas transformer nos larmes en fleuve pour t’en aller naviguer dans cet espace si bellement peint par toi sur tant de toiles. Toiles devenues voiles gonflées des vents sans temps.
Christiane Laforge
24 mars 2015