Etude de la syntaxe dans mon roman La Frontière

Publié le 29 mars 2015 par Lucie Léanne @lucieleanne75

Comme je l’ai dit précédemment, dans l’écriture de La Frontière, j’ai privilégié, donc travaillé, le style par rapport à l’histoire. J’entends par style, la matière poétique mais aussi la syntaxe, c’est-à-dire la façon dont les mots se combinent pour former des phrases ou des énoncés dans une langue.
A partir du chapitre 3, on peut voir un changement dans la structure de certaines phrases : la phrase qui comportait dans les premiers chapitres, le plus souvent cet assemblage sujet+ verbe+ complément, se trouve cassée, déstructurée ayant pour but d’accentuer la description d’un personnage, d’une émotion ou d’un sentiment. Cela se traduit par :

Syntaxe : association de noms entre eux

  • Phrase nominale :
    Ex :« L’infirmière cerbère » cerbère * = chien de garde des enfers dans la mythologie grecque.
  • Phrase contenant un seul verbe
    Ex :« Tête vide, jambes, bras en pierre, crampes calcaires : sédiments du moi ou ce qu’il en reste ».

Répétitions

  • Participé passé : « Régardé »
    Pendant tout le repas, j’ai regardé Mambo, assise volontairement près de lui, avalant involontairement, me forçant donc, à ingurgiter l’infâme bouillie verdâtre pour ne pas attirer l’attention de Nadine ou de l’infirmière qui surveillaient ; faire comme si, comme tous les autres jours, mais cette fois, j’espère le dernier. Regardé Mambo : mastiquer, digérer tant bien que mal, l’image de son visage mort puis celle de son corps inerte, de sa main mais pourquoi était-elle cachée dans la poche de son pyjama ? Qu’y avait-t-il de si précieux, de si vivant qui bombait l’étoffe ? Regardé Mambo pendant la sieste, cet après-midi, rentré de sa visite, étendu de tout son long sur le lit, comme libéré d’une cage mentale, invisible et toujours cette main au fond de la poche, enfermant quelque chose qui l’éloignait du néant, de sa carcasse rouillée d’accident ».

Syntaxe différente : rythme lent et rapide des phrases 

Dans ce roman, le rythme est primordial; à partir du chapitre 3, il s’accélère de manière progressive, évoluant avec l’histoire ; les phrases deviennent plus longues. Pourtant certaines phrases entrecoupées par des tirets d’incise comme des parenthèses, montrent un ralentissement du rythme, une pause : le temps semble en suspens.

  • Phrases avec tirets d’incise

Ex :« Et d’un seul coup il reçoit une gifle, une formidable gifle qui claque dans l’air : il reste stupéfait -les malades qui se sont arrêtés de manger, le regardent sans comprendre ; le réfectoire est devenu terriblement silencieux, on n’entend plus maintenant que le chant de Mambo doux, irréel, le chant du souffleur de rêves qui tourne sur lui-même depuis des années, un bercement magnifique au-dessus du vide ; je m’y enroule, je m’y glisse- puis tout recommence, tout se recouvre d’une fine couche de bruits et Mambo retombe dans l’oubli. »

Ex :« Mambo est exténué comme si l’accident qu’il avait eu se répétait indéfiniment en lui -choc effroyable quelques secondes, voiture en vrille, la vie lentement dévie, hésite sur sa trajectoire, indécise entre deux mondes, puis revient dans la tourmente- et qu’il restait rongé par cette gangrène d’images en suspens »

J’ai rédigé cet article pour montrer le travail de fou que j’ai effectué à propos de la syntaxe, de la place des mots dans mon roman. Grâce à ces quelques exemples, je suis sûre que vous vous empresserez de le lire.