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De la guerre civile – partie 2, des batailles, partie 1 (Commune 21/24)

Publié le 02 mars 2014 par Deklo

De la guerre civile – partie 2, des batailles, partie 1 (Commune 21/24)Précédemment, on a vu les préparatifs de la bataille...

Thiers, dans une circulaire parue au J ournal officiel le Rappel

Selon Vinoy, le docteur Pasquier, qui " remplissait les fonctions de médecin en chef de l'armée de Versailles ", " était parti le matin de cette ville pour organiser le service des secours " . Il est " seul, à cheval et sans armes " et se perd, " trompé par une fausse indication ", " lorsqu'il se trouva à portée d'un avant-poste de fédérés, qui firent feu sur lui ". Noter que dans cette version, on s'empare du cheval . Vinoy conclut : " Les premiers coups de feu avaient donc été tirés par les soldats du Comité central " et parle de " meurtre " et d'" assassinat " . Remarquer qu'il conteste la version des fédérés qui disent avoir " pris le docteur Pasquier pour un colonel de gendarmerie ". Noter pourtant que même le journal l e Temps

Ce ne sont pas des souvenirs, mais des sensations qui revenaient tout à coup assaillir le corps en entendant le canon. Ces sensations, les mêmes que celles avec lesquelles on avait appris à vivre pendant le bombardement prussien cet hiver, la peur, la faim, le froid, intactes, qui retrouvaient la familiarité des chairs qu'on pouvait croire qu'elles n'avaient jamais tout à fait soulagées. On entend quelqu'un dans la rue dire que c'est une fête des Prussiens . La rumeur s'élève, le bruit des corps qui vont sans savoir, les voix qui se choquent et les cris. Une voix se rassure : " C'est une salve d'anniversaire " . Quelqu'un d'autre s'effraie : " C'est le siège qui recommence ! " . On ne peut toujours pas bouger. On s'est redressé à un moment, on ne saurait pas dire quand, et on est là, immobile, à écouter ces bruits. On sait très bien ce que c'est ces canons. On ne peut pas se résoudre à se le dire, c'est tout. Le son des mots qui désignent paraît plus brutal encore que la violence des obus : c'est Versailles qui attaque. On se regarde : on sait. On sait qu'on sait.

A un moment, on est parmi la foule. On ne sait pas comment on a fait, comment le corps s'est mis en mouvement pour se déplacer jusqu'à la Bastille. On est là, il y a deux cent milles hommes de cette place jusqu'à la Concorde . On regarde. Les gens chantent . On regarde encore. On voit la joie, l'espoir, la fierté des républicains. On les voit vraiment. On pourrait les toucher. Ils sont les membres, les organes, les muscles, les chairs et le souffle, surtout le souffle, d'une idée sublime et monstrueuse : la République. Et devant l'étendue et la densité de ce corps, tous ces gens réunis et décidés, on est certain qu'elle ne se laissera pas réduire.

Quelqu'un, à côté, pense que Thiers a voulu éprouver Paris , compter les Communeux prêts à se battre, vérifier la profondeur des racines de la Commune dans le Peuple [réécrire cette phrase, l'image est vilaine]. On écoute. Il demande : " en voyant que, pour réduire Paris, il faudrait des mois de lutte fratricide et des flots de sang versé, est-ce que tout homme ayant une conscience, un sens moral, un cœur, [ne sentirait pas] faiblir sa résolution criminelle ? " . Et puis on ne veut plus écouter. Sa naïveté, c'est un déchirement dans le corps. On pose le regard sur ces milliers d'hommes autour. On voit la violence qu'il va falloir convoquer pour les faire taire. On frissonne. On se demande comment c'est possible, un gouvernement qui refuse d'entendre. On ne sait pas répondre. On ne sait pas répondre, parce que les raisons qu'on trouve tiennent, toutes, de l'épouvante.

Flourens finit par accepter de se replier, prêt à reprendre le combat le lendemain. Il est retrouvé par des gendarmes dans la maisonnette où il avait trouvé refuge, un " cabaret " pour Favre . Louise Michel reprend le témoignage d'un proche sur l'arrestation de Flourens , d'après lequel il fut assassiné à peine arrêté, la tête fendue en deux par le sabre d'un capitaine de gendarme, achevé par le coup d'un fusil dans l'oreille.

Dimanche prochain, on poursuivra l'étude des batailles...

[1] Augustine M. Blanchecotte, Tablettes d'une femme pendant la Commune, Paris, 1872, p. 30.

[2] Joseph Vinoy, Campagne de 1870-1871, Paris, 1872, p. 247.

[3] Jules Favre, le gouvernement de la Défense nationale, Tome III, Paris, 1875, p. 303.

[4] Gustave-Paul Cluseret, Mémoires, Tome I, Paris, 1887, p. 40.

[5] Louise Michel, la Commune, coll. Classiques des sciences sociales, p. 226.

[7] Lissagaray, Histoire de la Commune de 1871, Paris, 1929, p. 171.

[8] Arthur Arnould, Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris, éd. J.-M. Laffont, 1981, p. 177.

[11] Journal officiel de la République française, en date du 3 avril 1871.

[12] Le Rappel, en date du 5 avril 1871.

[13] Le Rappel, en date du 3 avril 1871.

[14] Le Temps, en date du 3 avril 1871.

[22] Cf J. Vinoy, op. cit., p. 265, Lissagaray, op. cit, p. 173 et J. Favre, op. cit, p. 304.

[24] Lissagaray, op. cit., p. 172.

[26] Lissagaray, op. cit., p. 172.

[34] Lissagaray, op. cit., p. 172.

De la guerre civile – partie 2, des batailles, partie 1 (Commune 21/24)

Cindy Sherman, Untitled #259, 1992


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