Depuis peu, en allant travailler, j’ai pris conscience d’un phénomène étrange. À mesure que j’approche du lycée, entre les rangées de pavillons Phénix et les fermes en ruines, je sens une irrépressible nausée m’envahir. Cette sensation tient à la fois du haut-le-coeur, naturel et salutaire, qu’on éprouve devant la charogne putréfiée d’un alligator, et de la petite déprime saisonnière causée par la disparition du soleil derrière l’épais couvercle nuageux de la Seine-et-Marne.Comme cette nausée agaçante tendait à revenir tous les matins, j’ai commencé par accuser la boulangerie de la gare de Melun et ses pasteis de nata. Mais non, c’était autre chose. Elle a le petit goût d’une madeleine qui aurait trop macéré. Cette nausée, c’est aussi un souvenir. Le souvenir des longs chemins vers l’école.
[1] On consultera avec profit l’article « La littérature au lycée agonise ? Achevons-la ! » dans l’onglet L’Ecole de la République.[2] Rabelais, Gargantua, livre LVII (1534)