Faire preuve d’humour

Publié le 29 avril 2015 par Bobo Mademoiselle @bobo_mlle

Ce n'est pas le moment de se laisser abattre, loin de là. Maintenant que je renoue avec les entretiens d'embauche, les envois frénétiques de CV, les développements de projets alambiqués, plus que jamais l'heure est à l'humour, à la boutade, au bon mot. Ce n'est pas facile (oh que non)(crois-moi, je suis plus qu'à mon tour à deux doigts d'échapper un " mon CV dans ta gueule " bien mérité) mais raisonnons-nous : nous avons bien plus à gagner en nous rendant sympathique.

Ami lecteur, tu glousses en lisant mes billets (vous êtes trois, je vous connais par vos prénoms donc pas d'histoire, je sais que vous gloussez). Tu t'imagines une bonne vivante pleine d'entrain, un peu torturée certes, mais pimpante et menant une vie qui se prête à de multiples #TeasingDeOuf aussi amusants qu'inattendus. Eh bien tu m'en vois ravie, mais je vais devoir remettre les pendules à l'heure : je suis quelqu'un de sinistre. Je n'ai pas la bouche naturellement souriante (tu sais, quand les commissures des lèvres pointent spontanément vers le haut), je ne pars pas dans de grands éclats de rire à tout bout de champ. Pessimiste à tendance dépressive, les débordements d'enthousiasme me fatiguent ou me laissent perplexe - c'est selon - tant je les associe à un excès de naïveté ou à de l'exaltation stérile.

Cela étant, je suis bon public sauf que ça ne se voit pas. Je m'esclaffe bien souvent en entendant une bonne blague et il m'arrive même de rire aux éclats mais tout ça se passe à l'intérieur de moi, quelque part entre mon plexus et mon cerveau : bref, j'ai une vie intérieure extrêmement riche qui ne transparait sur mon visage qu'en de rares occasions (et uniquement devant un public choisi). En d'autres termes, qui me voit pour la première fois pensera que je suis - au choix - pimbêche, revêche, triste à en crever, autoritaire, d'une timidité maladive, prétentieuse ou arrogante (je n'invente rien, je ne fais que restituer les propos de ceux qui ont fait l'effort d'apprendre à me connaitre). Jusqu'ici nul ne m'a dit qu'en faisant ma connaissance, il avait spontanément eu envie de me parler " parce que j'avais l'air SUPER SYMPA ". J'en ai fait mon parti et finalement je ne le vis pas comme un handicap. Je me sens un peu comme la forêt amazonienne : un terrain fertile mais dur à apprivoiser.

Seulement voilà : en entretien d'embauche je n'ai d'autres choix que de chasser le naturel. Je n'ai qu'une chance, qu'une heure pour me rendre indispensable et pour remplacer le sarcasme par le bon mot, prononcé avec le sourire si possible.

J'ai enfilé le masque de la fille avenante pour la première fois lors d'un entretien d'admission à un master, et c'est grâce à lui que cet entretien ne s'est pas transformé en fiasco, ce qui relève de l'exploit compte tenu de mes réponses. Pour des raisons que j'ignore, je n'avais eu droit qu'à des questions déstabilisantes de géographie : de la capitale du Turkménistan à l'altitude de l'Oural en son point culminant, du nom du président du Yémen au débit du Mississipi. Je m'étais dépatouillée de chacune de ces questions avec une boutade, en souriant (" et moi qui suis incollable sur les capitales des pays en " -stan ", voilà que le nom de celle-ci m'échappe ", " l'Oural ? c'est quoi le nom du domaine skiable ? parce que sinon Courchevel culmine à 1900 mètres "). J'avais quand même fini l'entretien en transpirant à grosses gouttes et en doutant énormément de ma capacité à le conclure sans demander l'aide du public ou le coup de fil à un ami. Et puis il y avait eu l'ultime question, la seule dont je connaissais la réponse - dans quel pays se trouve Vladivostok - mais à laquelle j'ai été incapable de répondre autre chose qu'un 'je-ne-sais-pas' honteusement murmuré du bout des lèvres, persuadée que j'étais trop nulle pour véritablement connaître la bonne réponse. J'ai du attendre une semaine les délibérations du jury qui ont établi que j'avais ma place dans ce master et il va sans dire que ce n'était pas grâce à mes connaissances en géographie.
Depuis, je suis convaincue que ce qui compte n'est pas tant ce que l'on dit mais la façon dont on le dit.

Cette semaine, j'ai passé différents entretiens. Je me suis donc préparée en faisant des exercices de diction, en réécoutant des sketchs de Raymond Devos et en relisant un bon Jaenada. L'heure de l'entretien arrive, j'entre en scène - trac, bouche sèche, transpiration - et je souris à pleine dents. Ami lecteur, je suis navrée mais le moment n'est pas encore venu de rentrer dans les détails de cet entretien (je te le raconterai quand j'en saurai plus sur la tournure des événements)(ces recruteurs sont des barbares qui mettent un temps infini à départager les candidats (#TeasingDeOuf)).
Mais tout ce que je peux te dire pour l'instant c'est qu'on s'est vraiment bien marré.