NOIRS
I l y aura un ciel blanc trop grand
tu t'avances dans un monde
illisible - personne n'a dérobé
le nid des mésanges - et ses
nuages épais comme dans la
main d'un chêne
Le vent le vent
les corbeaux sont fous - une
aile noire te masque et le temps
passe - le moment venu tu n'as
pas su descendre - toutes tes
conquêtes tiennent dans une
boîte d'allumettes
Une bille une coquille de noix
trois points de nuit au blanc
de l'œil - la langue collée au tronc
de l'églantier - une épine sous
l'ongle - emporté par le mascaret
de son parfum - roulé - dans le
sommeil paradoxal
Les fleurs d'ail des cris derrière la haie
du gravier tes bataillons en
marche - la pluie revient et
te décolore - cloué à la porte
d'une grange
Jacques Abeille, " Ce qu'il reste d'un jeune homme qui maigrissait " in Petites proses plus ou moins brisées, Arfuyen, Collection Les Cahiers d'Arfuyen n° 222, 2015, pp. 29-30-31-32. Prix Jean Arp de Littérature Francophone pour l'ensemble de son œuvre.