Notre dignité n'est pas à vendre

Publié le 05 septembre 2010 par Revolutie

Il arrive un moment dans la vie d'un homme où il doit choisir de mettre fin à l'échange de sa dignité contre un peu de tendresse et d'attention. Il arrive un moment où l'indifférence doit être prise comme un mépris extrême et où les tentatives unilatérales de déchiffrement des énigmes doivent cesser. Spinoza disait " Ne pas railler, ne pas déplorer, ne pas maudire, mais comprendre. " Mais pour comprendre il est besoin de la présence de l'objet que nous voulons comprendre. L'analyse et la compréhension ne peuvent se faire en l'absence de l'objet lui-même car la réflexion finit par tourner en rond. Sans objet, pas de compréhension possible.

Et il arrive un moment où le désir même de comprendre doit être anéanti. Face à l'indifférence, l'attention serait un rabaissement. Face à l'indifférence, la demande serait un déshonneur. Quand un homme est confronté à l'indifférence méprisante de ceux qu'il croyait proches et bienveillants, tout ce qu'il lui reste c'est sa dignité. Mais il perdra cette dernière s'il ne sait regarder droit devant sans jamais retourner la tête. Essayer de comprendre, d'expliquer, d'excuser, de pardonner sont des actes nobles. Mais, confrontées à l'indifférence silencieuse, ces qualités deviennent des humiliations qu'on s'inflige à soi-même. Face à l'indifférence silencieuse, chaque attention est un outrage à sa propre dignité. Il ne s'agit certes pas de devenir froid et indifférent au monde, surtout pas. Il s'agit seulement d'offrir ce qu'on reçoit, de donner à chacun ce qu'il demande et ce qu'il mérite. C'est cela la justice, non ? On s'humilie trop souvent pour un regard, pour une parole. On met nos deux genoux à terre pour une caresse. Mais celui qui fait de notre rabaissement la condition de son attention n'a en fait rien à nous offrir. Et rien de ce qu'il nous offrira ne nous conviendra réellement. Notre dignité est notre bien le plus précieux. Ceux qui nous la demandent en échange de leur attention sont nos ennemis et en aucun cas nos amis. Ceux-là ne nous respectent pas et nous n'avons que faire de leur attention intéressée. Leur sollicitude est conditionnée par l'intérêt qu'ils y trouvent, autant dire qu'ils n'ont pas compris le sens de la sollicitude. Pour eux, le respect est un échange et non un devoir. Ceux-là font peu de choses gratuitement, la plupart du temps leurs actions étant motivées par une attente personnelle voire égoïste. Ce genre de personnes profite de notre souci moral pour en tirer des bénéfices personnels. Et c'est souvent devant ce genre de personne inattentive, indélicate et sans sollicitude que nous nous prosternons pour obtenir une caresse et de l'attention. Nous troquons notre dignité pour nous sentir moins seuls. Mais ne sommes nous d'autant plus seuls que nous côtoyons des personnes qui diffèrent trop de nous ?

Rester digne et regarder droit devant nous permet de nous consacrer à des choses plus importantes et à des personnes qui savent apprécier notre sollicitude. Il ne sert à rien de donner à boire à quelqu'un qui a faim. C'est pourtant ce que nous faisons quand nous voulons compenser l'indifférence des autres par notre sollicitude. Et nous oublions et ignorons par là-même ceux qui ont faim et qui nous attendent impatiemment.

Apprenons à poser notre regard sur les choses qui y sont sensibles. Apprenons à parler aux oreilles qui nous écoutent. Apprenons à vivre avec ceux qui nous respectent et à oublier ceux qui nous manquent de respect.

Notre dignité n'est pas à vendre.