La blessure

Publié le 03 septembre 2010 par Revolutie

L'homme qu'elle aimait était parti. Rien
ne le ramènerait assurément, car il avait préféré mourir que...
Que " quoi " au juste ?
Elle ne savait pas, elle ne saurait jamais parce qu'il était parti sans rien dire.
Quelle douleur l'avait torturé ?
A quel espoir insatisfait avait-il répondu :
" Non, je refuse d'accepter, de cesser d'espérer, de ne pas recevoir ce que j'attends depuis l'enfance, la naissance, l'incarnation ou mes vies antérieures. Je refuse que le monde soit ce qu'il est. Je refuse ce que je suis ".
Qui sait ?
Lui-même, a-t-il reconnu, avant de mourir, ce qui le tuait ?
Elle était restée au bord d'un vide, incapable de sauter, incapable de reculer, avec cette blessure ouverte : " Pourquoi ? "
Elle avait tenté de vivre, tenté de le haïr pour le rejeter de sa vie, tenté d'aimer sa souffrance jusqu'à l'acceptation. Mais il y avait toujours ce " Pourquoi ? "
Désormais, chaque jour qu'elle vivait, elle se demandait aussi : " Pourquoi vivre ? "
Le Bouddha traversait la ville, elle traversait la rue. Elle n'est pas venue à lui, elle ne croyait pas qu'une main puisse se tendre dont elle sentirait la présence.
Saripûtra, le grand disciple, inspiré par la compassion du Bouddha lui demanda :
- Maître, un homme est à terre, blessé d'une flèche, que doit-il faire ?
- Saripûtra, cet homme demandera-t-il : " Quel est l'homme qui a tiré cette flèche? Quel est sa caste et son pays ? Quel est le nom de son arc ? Pourquoi a-t-il tiré ? ", ou bien demandera-t-il : " Quelle est ma blessure, comment puis-je la soigner, où habite le médecin ? "
- Maître, assurément l'homme se demandera quelle est sa blessure et comment la soigner.
- Comment se fait-il, Saripûtra, que nous répondions si justement pour les blessures concernant le corps physique et que nous posions les questions concernant l'origine de la flèche et le nom de l'arc lorsque nos blessures sont invisibles pour les yeux ?
Elle traversa la rue, il traversa la ville.