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Virginité et liberté

Publié le 02 juin 2008 par Dicidense

C’est donc l’affaire de la semaine, l’histoire d’un mariage annulé, car la mariée n’était pas aussi “pure” qu’elle l’avait prétendu. Je passerai sur le pseudo amalgame dans lequel tout mauvais journaliste, piètre politique et naïve féministe s’était glissé, le mariage n’a pas été annulé à cause des galipettes passées de la demoiselle, mais juste sur le fait qu’il semblerait qu’elle ait menti sur la question. Dont acte, on peut débattre des heures sur le bien fondé d’avoir à mentir sur une telle chose, la tromperie est avérée. Et bien que nous envisageons tous le mariage sous la forme amoureuse, tendres optimistes que nous sommes, un mariage civil est avant tout un contrat, qui dans ce cas n’était pas respecté.

Depuis la médiatisation de l’histoire, le spectacle est grandiose : les JT flairent le bon cocktail, un peu d’Islam, un peu de sexe (pour un peu, la future mariée perdait sa virginité dans une tournante), les féministes dans leur rôle crient à la régression sociale, les anti-musulmans dénoncent la mainmise de l’Islam sur les institutions et les ministres y vont chacun de leur petit commentaire, piétinant allègrement le principe de séparation des pouvoirs. La palme revenant à notre chère ministre de la Justice, tentant dans un premier de soutenir mes magistrats, en arguant le fait que la décision protégeait la jeune fille. Ben voyons…

Laissons le tourbillon médiatique étourdissant de côté et focalisons nous sur l’essentiel : il s’agit tout de même de déclarer si notre justice est capable de prendre en compte des traditions qui n’ont plus cours dans notre petit pays depuis quelques temps (je vous rassure, pas bien longtemps, merci mai 68). Or jusqu’à preuve du contraire, chaque tradition, tant qu’elle ne porte pas atteinte aux personnes, n’a pas à être jugée. Je fais bien entendu parti des libertaires de ce pays, si cela ne tenait qu’à moi, Paris serait le théâtre de gigantesques partouzes, mais soyons honnête, s’il me vient à rencontrer demain une jeune femme qui m’assure vouloir garder sa virginité pour son futur mari, je ne vois pas ce qui m’autoriserais à la traiter de tous les noms. Je ne vois pas pourquoi j’agirais d’une manière différente avec un homme.

Je crie à tort et à travers, à longueur de journée, que le visage de la France a changé, il n’y a aucune raison que la justice de ce pays soit totalement étrangère à cet élargissement de culture, tant que ces traditions ne rentrent pas en confrontation directe avec la liberté individuelle. Or pouvoir choisir ce qui pour chacun est une qualité essentielle des personnes est pour moi une liberté fondamentale. Certains préfèrent les blondes, d’autres les rondes, que ce soit par goût ou par tradition, leur système de valeur ne se discute pas.

Je ne suis pas totalement dupe, je sais bien tous les problèmes de liberté, d’émancipation féminine et autres qui se drainent derrière toutes ces interventions. Ceci étant dit, s’esclaffer de manière véhémente contre une décision concernant un point très privé ne me donne pas l’impression de faire avancer les autres débats. Si le mariage est finalement re-confirmé, la Femme aura-t-elle gagné un peu plus de liberté en France ? Les jeunes filles se pressant dans quelques cliniques privées vont-elles renoncer à leur opération pour autant ? La non-discrimination aura-elle fait une avancée dans les consciences ? Je ne crois pas, et il me semble que bien des combats bien plus importants et emblématiques restent à gagner dans ce sens. D’ailleurs, il semblerait que, selon l’avocat de la jeune femme, les époux étaient tombés d’accord pour annuler leur union. Je ne sais pas si marier la jeune femme “de force” à un homme qui n’en veut visiblement plus serait le meilleur service à lui rendre.


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