Homélie : Saint Germain de Crioult 12 juin 2015
SOLENNITE DU SACRE CŒUR
Chers frères et Sœurs, chers Amis,
En cette fête du Sacré-Cœur, en ce lieu particulier qui nous rassemble avec sobriété, nous sommes invités à nous laisser toucher, rejoindre et transformer par la Parole de Dieu, accordée à la solennité.
La première lecture nous offre une profession de foi du prophète Osée. Il aurait eu de bonnes raisons de s’éloigner de Dieu, de l’abandonner, de le tenir à distance et de s’en méfier, tellement sa vie avait été traversée par l’épreuve, la mort, les difficultés dans sa famille et l’incompréhension de ses proches. Osée, loin d’adopter ce comportement humain, a continué à se tenir devant Dieu et à pénétrer la richesse du don de Dieu. Il a expérimenté avec flamme et profondeur l’intérêt que Dieu porte à l’homme. Sa première découverte, inépuisable, riche et féconde est d’affirmer que Dieu entretient avec l’homme une relation profonde, intime et intense. Son amour rejoint chaque homme sous des formes qui nous échappent et que le prophète reconnaît, chante et exalte. Dieu aime, chacun, comme un être choisi, comme son enfant bien-aimé. Nous sommes choyés par Dieu, dans l’intime de notre être, la profondeur de notre cœur et l’orientation de notre vie. Nous pouvons errer, vagabonder, trahir cet amour, Dieu continue à nous le proposer avec délicatesse, justesse et un respect incompréhensible de notre liberté.
De plus, Dieu nous aime, comme un pédagogue, un éducateur, un père qui invente des chemins pour nous faire reconnaître ses intentions, apprécier sa présence et entrer dans l’intimité de son dessein. Il ne se fatigue pas d’adapter ses propositions aux méandres de notre vie, aux hésitations de nos réponses, et mêmes à nos trahisons inconséquentes. Reconnaissons, aujourd’hui, les multiples signes qu’Il nous a adressés depuis que nous sommes les uns et les autres capables d’apprécier vraiment sa présence et son action dans nos vies.
Le prophète Osée nous enseigne que Dieu n’intervient pas dans notre vie, à distance, comme un chef anonyme et distant qui nous imposerait une route unique. Il prend l’initiative de s’adapter à notre rythme, d’adopter nos lenteurs et de s’ajuster au rythme parfois déconcertant de notre réponse. Il nous traite avec humanité et nous propose des liens d’amour. Il est votre libérateur. Il vient à notre secours aux heures de solitude, de souffrance, de désarroi et au cœur de notre détresse. Jamais, il ne nous lâche, ni ne nous abandonne. Il nous prend dans ses bras et nous traite à longueur de vie comme une mère choyant son nourrisson. Il nous soulève chacun, tout contre sa joue, avec une délicatesse qui nous ébranle, nous étonne et nourrit ce lien. C’est ce message qui prend visage, dans notre histoire, avec le Christ.
Nous sommes réunis, dans cette église, aujourd’hui, nombreux et confiants pour une rencontre d’amour avec le Christ dans son eucharistie. Sa proximité s’exprime par le pain. Ce signe traduit la volonté du Christ de nourrir son peuple, de combler sa faim, de rassasier sa passion de vivre et de s’accomplir.
Le signe du pain se trouve aussi exprimé par le vin de la coupe qui va être consacré par les prêtres.
Ce sacrement de l’amour qui se donne, du Christ qui se livre, nous est confié comme la nourriture dont nous avons besoin comme disciples de Jésus. Ce signe nous est proposé. Il est la présence aimante, proche, nourrissante de notre libérateur et de notre sauveur. Nous l’accueillons avec joie, dans la foi, et nous acceptons de vivre en conformité avec le message que le Christ nous confie.
Il a donné sa vie, pour l’humanité, pour chacun d’entre nous. Il nous rappelle qu’en donnant sa vie, et en nous arrachant définitivement au mal et au péché, il nous invite à entrer dans le même mouvement. Nous
aussi, chacun d’entre nous, au point où nous en sommes du déroulement de notre histoire, nous sommes conviés par le Christ lui-même à donner notre vie pour nos frères.
Pour nous maintenir dans ces dispositions, nous avons : " tout d’abord à reconnaître que tout homme nous est confié, comme un frère ". Cette relation est à découvrir, à inventer et à vivre dans la vérité de nos diverses situations. C’est Dieu lui-même qui nous confie les uns aux autres et nous demande de nourrir avec chacun des relations de fraternité. Ce contexte dans lequel nous vivons aujourd’hui dans notre pays et dans notre région, nous oblige, en quelque manière, à renforcer, à inventer, à désensabler tous les chemins de la reconnaissance fraternelle de tous ceux qui nous sont proches et qui ont à le devenir ou à le redevenir avec une plus grande intensité.
Nous avons un second pas à engager. Il consiste à rendre compte de notre foi, non pas par des formules, des connaissances, mais par notre vie. Il serait souhaitable que ceux, qui nous entourent et nous voient vivre, soient portés à formuler la même appréciation que les païens à l’égard des premières communautés chrétiennes : voyez, comme ils s’aiment. C’est cette aventure éloquente de l’amour, qui se donne, qui se livre, qui emprunte tous les chemins d’humanité possible que nous avons à emprunter, avec audace, confiance et dans l’assurance de la foi. Chacun d’entre nous est invité par le Christ à risquer un pas plus assuré, plus personnel sur cette route d’accomplissement.
Nous avons aussi à prendre à la lettre l’Evangile de Jean, reçu en ce jour, à rendre compte de notre foi, de nos raisons de vivre, avec simplicité. Cette démarche prend des formes variées. Elle emprunte la route de l’échange, elle se glisse dans le dialogue, elle épouse la voix de la confiance et s’ingénie à développer les ressources créatrices, délicates et fécondes de l’amitié. Le Seigneur Jésus, n’en doutons pas un instant, est vraiment présent sur toutes nos routes. Bien mieux il nous y précède et son Esprit nous les rend praticables. Elles sont ouvertes à notre cœur. A chacun d’entre nous de nous y engager encore plus résolument.
L’amour de Dieu ruisselle dans l’eucharistie. Il nous est offert pour relever le défi de la vie, nourrie de foi, soutenue par l’espérance et stimulée par une charité joyeuse, rayonnante et contagieuse.
AMEN
+ Pierre PICAN
+ P.PICAN – Sib.