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Chaleurs funestes - 28/28

Publié le 13 octobre 2009 par Cathgenin

Posez ce tisonnier près de la cheminée, ordonna Paul à ses jumeaux qui se servaient des pincettes comme d'une épée, et ne faites pas de bruit, Jeanne dort !

Il passa devant les cours de tennis, la piscine municipale, le château d'eau et gagna la place du village déjà noire de monde. Tables et bancs étaient installés autour de l'église, les maraîchers vantaient les produits du terroir et répondaient tant bien que mal à la demande d'une foule pressante et exigeante, d'immenses barbecues déjà allumés attendaient de recevoir saucisses et pièces de viande, la buvette tenue par Jeannot n'était accessible qu'en jouant des coudes et de grandes tentes abritaient des villageoises occupées à la confection de crêpes et de frites. Un peu plus loin, un orchestre régional se mettait en place, testait les micros, accordait les guitares.

Il était vivant ! Il sentait la transpiration et la mauvaise graisse, mais il était vivant ! Il fit même tournoyer Chlöe, étonnante rencontre d'Eros et de Thanatos, demanda à l'orchestre de jouer un slow de Frédéric François et enlaça Inès sans laisser de place à la pudeur. Elle se laissa aller contre lui, aimant jusqu'à la moiteur que dégageaient leurs corps, s'abandonnant entre ses bras, indifférente aux regards des autres. D'ailleurs, personne ne prêtait attention à eux. La nuit était tombée, des guirlandes lumineuses avaient été installées, mais ils s'en éloignaient emportés par leur désir de se retrouver seuls au milieu de la foule, leur envie d'avoir envie.

Virginie avait-elle apporté sa caméra ? Qu'aurait filmé Claude Sautet ? Les grandes tablées affamées ? Les amants enlacés ? Peu importait, elle n'était pas Hélène des Choses de la Vie, ni Rosalie sans César, elle était Inès et tenait le première rôle entre les bras de celui qui n'était plus tout à fait un jeune premier !

Elle le savait, la fin du week-end verrait la dissolution du petit groupe. Il était temps, avant que s'installe perfidement une désagrégation, une déliquescence bien peu éloignée. La dénaturation des relations avait eu l'effet pervers d'engendrer une pourriture, une débauche d'outrages et d'irrévérences. C'était comme si le corps d'Antoine avait été profané, comme si le blasphème et le sacrilège avait été jetés à la face d'Inès.

Le bouquet final provoqua une explosion de joie. Il éclata au dessus du clocher de l'église et éclaira l'assemblée comme en plein jour avant de diffuser à nouveau des gerbes d'or. L'espace d'un instant le visage de Sophie fut inondé d'une lumière vive et Inès aperçut Michel dans son sillage. Elle s'approcha de lui et l'informa de la situation. Avertie par Paul, Christine se joignit à eux et le trio partit en direction de la Grangerie.

Aucun d'entre eux ne manifestait d'appréhension particulière, mais regrettait que leur soirée fût interrompue par des " nigauderies " comme aimait à le dire le père d'Inès.

F I N

Chaleurs funestes 28/28


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