… dans l’océan tourmenté qu’est la vie ?
D’où l’importance du choix des livres suivant notre état d’esprit.
C’est vrai, l’article commence comme une boutade provocatrice. Mon livre idéal pour qu’on me laisse peinarde dans les parcs publics : « je tue les enfants français dans les jardins », de Marie Neuser, pour sûr on viendra pas me piquer mon banc…
Il y a des livres qui nous marquent, des livres qui sont su éveiller nos sens : la colère, la raison, la tristesse, la volonté, la joie… ce sont les livres dont on ne se sépare pas, parce qu’ils ont secoué une partie de nous, ont bouleversé notre esprit et nous ont peut-être changé. Ceux-là sont ceux qu’on veut garder à proximité de soi afin d’y replonger de temps à autre et retrouver ce sentiment qu’ils ont su soulever.
Je me souviens avoir gardé pendant longtemps sur ma table de chevet « ensemble, c’est tout », d’Ana Gavalda, parce que l’humilité, l’amitié, l’espoir faisaient de moi une personne meilleure. Quand je rentrais stressée du travail, attristée par le manque de compassion de certains, par leur nombrilisme, il me suffisait de voir le livre, le sentir à proximité de moi pour ne pas perdre tout à fait espoir dans l’humanité.
Depuis outre ma bibliothèque (pas si grande que cela car je ne garde que les livres que j’ai appréciés), j’ai toujours quelques œuvres qui traînent sur mon bureau. En ce moment, voici les élus :
« Je tue les enfants français dans les jardins » ou l’expérience déplorable d’une professeur dans un collège difficile. Celui-ci réveille en moi la colère de cette injustice et dépeint l’avenir peu glorieux (et qui m’est tellement cher) de l’enseignement en France. Une petite torture nécessaire pour me rappeler les faits de la vie (moi qui ne me tient que très peu informée des faits de société).
« Flic » de Benedicte Desforges, pour le bouleversement qu’éveillent en moi ces anecdotes réalistes de la vie de flic, espoir et désespoir.
« Ecriture » de Stephen King, parce qu’il me rappelle la rigueur qu’il faut pour être auteur.
« Factotum », mon premier Bukowksi, qui démontre qu’on peut avoir une vie de merde et quand même y prendre plaisir (Il y a de surcroît un paragraphe imparable sur l’inutilité du travail:))
« Méditer jour après jour » de Christophe André. Je ne dépasse jamais la page 100, recommençant imperturbablement depuis le début, mais cette plongée dans notre conscience, l’attention aux détails, est à chaque fois un moment de paix et d’harmonie.
« W3, le souvenir des pendus » de Camus et Hug et « la vérité sur l’affaire Quebert » de Joël Dicker… simplement parce que ce sont les deux derniers livres qui m’ont tenue en haleine et que je tiens à faire perdurer le plaisir procuré.
Apocalypse Now, le journal intime que la femme de Francis Ford Coppola a tenu durant le filmage du chef d’oeuvre, parce qu’il montre les doutes du monstre sacré qu’est le réalisateur et me prouve qu’il faut se battre pour les choses auxquelles on croit même si on y doit y laisser une partie de son âme.
« Cent ans de solitude »… parce que… parce que Garcia Marques, quoi… j’ai oublié la raison de sa présence parmi les élus dix ans après sa lecture – je me souviens juste de la stupeur qui m’avait saisie à l’époque, je crois même qu’il y a un passage que j’avais appris par cœur-, mais j’ai besoin de le sentir auprès de moi, il me rassure, un peu comme un doudou d’enfance.
Bien sûr, suivant mes périodes, mon état d’esprit, les livres changent. J’ai eu pendant un moment : « va où ton cœur te porte » de Susanna Tamaro, parce que j’avais besoin de pleurer toutes les larmes de mon corps et qu’il me suffisait d’en lire quelques extraits pour m’enfoncer dans les abîmes obscurs du désespoir. J’ai aussi souvent des petits livres d’auto-construction, de confiance de soi, en France, cela n’est pas très porteur, mais certains m’ont réellement aidée. Arrivée vers la vingtaine, lézardant dans une fac qui ne me promettait aucun avenir, ne sachant que faire de mon existence, je me suis appuyée sur quelques-uns pour m’aider à surmonter mes crises d’angoisse. L’un d’eux était écrit par un magnat de la bourse qui avait perdu tout son argent lors du crash boursier de 29. Au lieu de se défenestrer comme nombre de ses collègues ruinés l’avaient fait, il avait choisi de changer totalement de direction existentielle en commençant par écrire ce tout petit livre où il y dépeignait la vie comme étant une grande farce. C’était léger, jubilatoire, un vrai sauve-la-vie. C’est pour ça que j’ai toujours un petit livre du genre sous le bras, pour me rappeler qu’on peut tout perdre mais qu’il y a toujours espoir. La vie est faite d’obstacles, d’épreuves, et il ne faut pas avoir peur d’y faire face afin de se renouveler encore et encore. D’autres l’ont fait, pourquoi pas nous ?
Après cette réflexion, je me demande si finalement les livres ne sont pas comme des bouées de sauvetage. Des supports existentiels. Certains y préfèrent la religion, mais quand on voit où celle-ci mène l’humanité… D’ailleurs Nietzsche à ce sujet disait dans son ouvrage « ainsi parlait Zarathoustra » que l’homme ne pourrait atteindre la liberté qu’en se libérant totalement de la religion, car celle-ci ne mène qu’à la servitude. Or dans un monde choisi de servitude, les livres n’ont pas de place, car le but premier de ceux-ci est de nous évader.
Les livres s’inspirent de la vie, ils nous guident, nous réconfortent, nous rendent plus fort,
donc mon conseil pour développer une vie harmonieuse, animée par un nombre insatiable de sentiments : lisez.