Dans le talus jouxtant la ligne de chemin de fer, un joli coquelicot s'ébroue de la fraîcheur de la nuit. Il étale ses pétales au soleil encore frais de ce petit matin et découvre à ses côtés un curieux personnage , peu grâcieux, la robe épaisse et la coiffure ébouriffée au vent.
Le coquelicot est stupéfait : comment est-il possible d'ainsi prendre plaisir à se laisser décoiffer ? Tout en inclinant vers son voisin son corps svelte et souple, il s'aperçoit rapidement que l'inconnu reste indifférent à son approche et, pire encore, qu'il ignore tout simplement sa présence trop occupé qu'il est à rester cheveux au vent.
Ne pouvant retenir plus longtemps son courroux, notre végétal rouge se met à gesticuler d'indignation, ce qui a soudain le pouvoir d'enfin faire réagir l'autre qui, de sa position haute dans l'herbe folle longeant les rails, se laisse distraire l'espace d'un instant, si bien que ne pouvant plus résister à la force du vent, sa coiffe moutonneuse s'effiloche et enveloppe notre ami le coquelicot qui se met à toussoter d'étonnement et à éternuer de chatouillement.
Que diable me faites-vous là ? clame-t-il aussitôt ne voyant plus se dresser devant lui qu'une tige verte sans aucune importance.