A ttirée par ta manière, ciel d'ailleurs resplendissant, grand quand tu te lèves, si étendu. Depuis trois ombres revenues, je couds et recouds, le soir, le même labyrinthe. Nos mains deviennent un projet irréaliste. Ce même projet de hâte qui démystifie les dangers. Je me mets à découdre tous les désirs d'avenir. Aux ciels couchés le long des heures sur les chemins, aux herbes, tu laisses, tes bottes, ta montre, tes notes, ton sac à provisions, tu laisses, tes angles, tes mines, tes travers, tes démons, tu laisses. Je me mets à parler de toi comme si j'habitais le chas de l'aiguille cousant l'éclat sur ta chemise, tu la laisses, elle aussi. Bien sûr qu'on abandonne l'enfant à ce moment-là. Bien sûr tu te redresses, drapé d'un nouveau décor en toi-même, tu laisses le panier d'osier, les noix, les colliers d'ail, tu laisses les sirops d'alcool, les macérats, ton tabac, tu laisses même les fruits sur l'arbre. Tu laisses sur la margelle de quoi recoudre quelques heures, devenues poisseuses, à la limite de ne plus voir la substance inconnue des femmes. Suis-je, parmi elles, celle qui t'apaise le plus ? Sans retenir ton nom, sans te demander si l'ange s'est lavé dans la sauge pendant que tu chantais. Depuis trois ombres revenues, je cous et recouds, le soir, le même labyrinthe. Dédale, je t'appelle, dédale. [JE COUDS ET RECOUDS LE MÊME LABYRINTHE]
Chloé Bressan, Claire errance, Éditions Isabelle Sauvage, Collection présent (im)parfait, 2015, page 23.