La maison de disques Capitol prévoyait d’enregistrer les Beatles en concert, lors de leur prestation du 12 février 1964 au Carnegie Hall de New York mais le syndicat des Musiciens Américains leur refusa l’autorisation. Six mois plus tard, ayant enfin obtenu ce droit, c’est le concert donné au Hollywood Bowl de Los Angeles, le 23 août, devant 18 700 fans, qui fut enregistré.
Les bandes devaient donner naissance à un album pour le marché américain uniquement mais la branche britannique de la maison de disques ne voyant pas d’intérêt au projet – des chansons déjà connues et sur leur catalogue – l’affaire capota.
Le concert entièrement enregistré (29 minutes ! Hé oui, en ce temps-là on ne forçait pas sur la dose !) fut mixé le 27 août par le producteur Voyle Gilmore et l’ingénieur du son Hugh Davies avec ajout de réverbération et équaliseur. Les titres, après une introduction du présentateur, Twist and Shout, You Can’t Do That, All My Loving, She Loves You, Things We Said Today, Roll Over Beethoven, Can’t Buy Me Love, If I Fell, I Want To Hold Your Hand, Boys, A Hard Day’s Night et Long Tall Sally. Mais le son, jugé globalement trop mauvais par Capitol et les Beatles en raison de la saturation causée par les hurlements du public, les bandes restèrent enterrées dans les archives jusqu’en janvier 1977.
Date à laquelle, exhumées, elles servirent de matériau à l’historique album live des Beatles, The Beatles At The Hollywood Bowl. En fait, ce disque est un savant mélange de deux concerts, celui du 23 août 1964 et celui du 30 août 1965, sous la houlette de George Martin et Geoff Emerick.
L’album sortira le 6 mai 1977 en Grande-Bretagne (chez EMI) et parviendra à la première place du hit-parade le 18 juin. Treize ans après la performance scénique et sept ans après la dissolution du groupe. Le disque a surtout valeur de témoignage, le groupe jouant dans des conditions complexes au milieu des hurlements, avec un matériel peu évolué. Les conditions de sonorisation sont encore à cette époque, balbutiantes et totalement inadaptées aux tailles des arènes dans lesquelles les Beatles sont le premier groupe de rock à se produire. Ce n'est qu'à partir des années 1970 que des groupes pourront se produire dans des stades ou de grandes arènes avec une sonorisation adaptée.
A ce sujet, George Martin explique : « Ils étaient très bons sur scène, particulièrement quand on considère qu'un de leurs problèmes était qu'ils ne pouvaient pas s'entendre jouer. Aujourd'hui dans les concerts, tous les musiciens ont des « retours » à leurs pieds et ils entendent tout ce qui se passe. Cela n'existait pas au temps des concerts des Beatles. John, Paul et George se tenaient debout derrière leurs micros face à une foule hurlante de 60 000 personnes tandis que Ringo était derrière eux avec sa batterie. Ringo m'a raconté une fois combien il était difficile pour lui de suivre : « Je ne pouvais rien faire d'intéressant. Je ne pouvais faire aucune figure, aucun roulement, aucune reprise. Je devais assurer le tempo tout du long pour que tout le monde reste ensemble. Je devais regarder leurs trois derrières gigoter pour savoir où ils en étaient dans les chansons. ». Ringo Starr met ainsi en lumière une des raisons majeures qui poussera les Beatles à cesser définitivement de donner des concerts à l'issue de leur ultime tournée américaine, en août 1966.