Choisir (tout court)

Publié le 25 septembre 2015 par Bobo Mademoiselle @bobo_mlle

Bon sang, c'est fou ce que le temps passe vite. Pas plus tard qu'il y a cinq billets, je me plaignais de la canicule et me voilà aujourd'hui avec un pull et un foulard à grelotter, tout juste remise de la première grippe de la saison. J'ai été victime d'une ondée, du premier coup de vent, affaiblie par ma suractivité des dernières semaines, sûrement.

Moins fort, ami lecteur, je t'entends d'ici hurler au hold-up ! " Suractivité-mes-fesses ! C'est pourtant toi qui paressais étendue sur le canapé il y a encore deux mois, toi qui narguais tes huit lecteurs en pianotant sur ton clavier d'ordinateur avec tes doigts encore huileux de crème solaire ". Alors oui, il y a beaucoup de vrai là-dedans, mais je t'invite à ne pas tirer de ces différents billets de conclusions hâtives : jusqu'à maintenant il n'a jamais été prouvé que la position allongée empêchait qui que ce soit de se plonger dans d'intenses réflexions (et Dieu sait s'il est épuisant de réfléchir). En témoigne une disgracieuse marque de bronzage en plein dans le creux de ma ride du lion tant j'étais concentrée même étendue sur la plage.

Si l'été fut propice au recueillement, à la contemplation et - à quoi bon le nier - à l'oisiveté, le mois de septembre a été, lui, placé sous le signe de l'action. Dès qu'il est arrivé, j'ai rangé mon paréo et mes tongs au placard. Très rapidement, j'ai aussi dû, bien malgré moi, troquer mon café frappé contre une tisane au miel et l'Oenobiol solaire contre une cure d'antibiotiques. Et puis, j'ai remis de l'ordre dans ma maison, retiré les grains de sable des touches de mon ordinateur, fait quelques menues réparations dans mon salon, jeté de vieilles babioles et trié mes vêtements d'été. J'ai fait des listes ('à lire', 'à écouter', 'à visiter', 'à contacter'), j'ai travailloté, lu plein de livres, vu plein de films et écrit plein de trucs.

Je me suis affairée à droite à gauche en arrêtant de me soucier du temps qui passe. J'ai pris chaque jour comme il venait sans en attendre rien de précis. Eh bien d'aucuns te le diront, c'est justement quand on n'attend plus rien que tout arrive. Ami lecteur, j'aimerais pouvoir te dire que Rockefeller Junior a sonné à ma porte la semaine dernière et que depuis nous convolons sur une plage des Maldives. Malheureusement non, mais je ne perds pas espoir.

C'est en culpabilisant que j'ai traversé l'été, toute crispée sur mon drap de bain. Je considérais qu'il était honteux de perdre mon temps à rêvasser sur la plage (ce que j'ai pu être sotte), que le moment était venu d'agir et de construire. Alors dès le premier septembre, j'ai agi en adoptant la méthode dite de l'entonnoir : je me suis d'abord attaqué aux petites choses du quotidien - nettoyer les tiroirs, coudre un ourlet - puis j'ai élargi petit à petit mon champ d'action. Je commençais à me dire que je pourrais facilement me contenter de cette vie-là, humblement agencée, mais porteuse de grandes satisfactions. C'est donc bien évidemment à ce moment-là que le destin a décidé de me bousculer.

Car voilà, ami lecteur, aujourd'hui je me trouve à un carrefour. Toutes ces menues actions menées au cours des dernières semaines n'ont pas servi qu'à faire diversion et à déplacer mon attention sur des choses concrètes, elles ont aussi, sans trop que je m'en aperçoive, ouvert quelques portes. Personne ne m'a fait de pont d'or, je n'ai pas eu la proposition d'embauche du siècle, mais je suis malgré tout face un choix professionnel. Je dois rapidement arbitrer entre deux situations aux antipodes l'une de l'autre - aussi bien dans leur contenu que dans leur localisation géographique - présentant chacune son lot d'inconvénients et d'avantages. Il ne me reste donc plus qu'à peser le pour et le contre. Lourde responsabilité.

Bizarrement, cet arbitrage je ne le fais pas en pensant à l'avenir et ce sur quoi ouvrira chacune des portes, mais plutôt en me souvenant du passé : j'entends que ce choix soit cohérent avec ceux qui l'ont précédé. Il s'agit donc de comprendre quelle suite logique celui qui a fait le choix de démissionner et qui s'en félicite chaque jour doit donner à son parcours. Comme aujourd'hui le temps est radieux, je vais m'empresser de chausser mes tongs pour songer à tout cela en profitant des derniers rayons de l'été indien. Ami lecteur, n'hésite pas à apporter ta pierre à l'édifice (ou plutôt ton grain au château de sable) : si tu as un avis sur la question, je le lirai avec plaisir entre deux bains d'eau fraîche.