Parlons un peu supers héros.
Ah non ! Pas encore me direz vous et je vous comprends parfaitement, actuellement on frôle même l’overdose. Et pourtant à la base j’aime les Comics mais ça, c’était avant qu’Hollywood ne s’en soit mêlé.
Tout avait pourtant bien commencé avec le « Spiderman » de 2002, modèle de transposition réussi au cinéma réalisé par un Sam Raimi très concerné par son sujet (rappelons que le film était considéré par les studios comme un projet « risqué »). Et puis Hollywood a soudainement changé. Sidéré par les chiffres d’entrées générés par la trilogie les studios ont mis en place un nouveau modèle économique. Disney rachetant la franchise Marvel, Warner DC; Comics, les super Héros devenaient la poule aux œufs d’or d’une profession se calquant de plus en plus sur un modèle industriel. Un nouveau produit chaque année piloté par des gens venant de moins en moins du cinéma mais plutôt des écoles de commerces, sortant des franchises de supers héros comme on sort une nouvelle cafetière au mépris de toutes considérations artistiques (mais volontiers dictées par des études de marchés).
Ayant soudainement découvert que la communauté des « Geeks »* pouvait être un marché très juteux et afin de s’acheter une intégrité artistique auprès d’eux, les « costards cravates » d’Hollywood ont donc décidés d’adapter les BD cultes des années 80/90. Ainsi j’ai pu voir avec horreur et consternation toutes mes BD préférées littéralement massacrées par ces studios. Des projets mis entre les mains de « Yes Men » qui n’ont manifestement pas compris le concept d’adaptation préférant « décalquer » bêtement les cases de ces comics**. Malheureusement, ces films obtenant un succès critique et financier important, il est encore aujourd’hui difficile de convaincre les gens autour de moi que : non à la base « 300 » n’est pas une comédie musicale Gay, et que le « Watchmen » d’Alan Moore est une réflexion puissante sur la figure du super Héro, et pas des comédiens mal dirigés filant des coups de tatane au ralentit au son de la compil’ Pop Rock spécial « Baby Boomers » (succès assuré dans les Bacs).
Cependant …. une petite ile isolée semble seule résister à l’envahisseur. L’Angleterre (car c’est elle) a en effet depuis quelques années déjà proposée à la télévision et au cinéma des alternatives au modèle Hollywoodien. Des gens comme Joe Cornish ou Edgar Wright ont compris que le passage d’un média à l’autre nécessitait une autre approche et que la figure héroïque (au sens BD du terme) devait être sérieusement modernisée. Ils ont compris qu’aujourd’hui on ne peut plus demander au public de s’identifier à des demi-dieux, des icones du passé (la plupart très chargé idéologiquement car nées dans les années 40). Les anglais se sont donc intelligemment emparés du genre pour le fusionner avec la tradition du cinéma social britannique. Les héros de leurs histoires ne sont plus des milliardaires ou des physiciens surdoués, mais de simple quidams pas forcement altruistes. En effet pour eux plus question de défendre le monde libre ou de sauver la veuve et l’orphelin, mais plutôt leur immeuble (le film « Attack The Block ») ou son gang de potes quitte pour cela à provoquer l’apocalypse (« The World’s End »). Et le spectateur de s’identifier d’autan plus à des personnages qui, comme nous, sont remplis de contradictions. Des êtres humains donc.
Ce qui nous amène logiquement à La série « Misfits ». Conçu pour la BBC en 2009 et déclinée en cinq saisons, elle raconte le destin burlesque de cinq délinquants, qui, pendant leur période de travaux d’intérêt généraux, acquièrent des supers pouvoirs suite à un orage magnétique. Encore une fois « Misfits » est une formidable relecture du genre et une mise en perspective du mythe du super Héro. L’intelligence du scénario étant d’attribuer aux personnages des pouvoirs en accord avec leurs propres personnalités (l’asocial du groupe peu devenir invisible, la Lolita rend fou de désir par un simple contact etc.) ainsi ces dons sont, pour certains un moyen de se dépasser ou au contraire pour d’autre une réelle malédiction. Ainsi le sous texte social permet d’enrichir considérablement ce qui pourrait n’être à la base qu’une pochade sur des supers Héros tout nazes.
Même si la série est hilarante (une réplique culte par seconde, acteurs au top) « Misfits » n’est jamais parodique. On sent un vrai amour de ses créateurs pour le genre et une vraie ambition à fournir par moment du pur spectacle (on n’est pas chez « Héro Corp », tentative similaire Française sympathique mais sans aucunes ambitions visuelles). De plus la bande originale enquille la crème de la pop anglais (The Rakes, Rapture etc.) filant un bon coup de fouet à l’ensemble.
Maintenant entre ça et les têtards Américains bodybuildés à vous de choisir votre camp.
* supposé « Geeks » car si tout le monde le deviens personne ne l’est vraiment
**Trop facile il me suffirait de respecter à la virgule près n’importe quel roman de la pléiade pour faire un chef d’œuvre ?