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Charlie, entre l’ange et la bête

Publié le 13 octobre 2015 par Observatoiredumensonge

Une de Charlie Hebdo octobre 205

charlie honteux

   Charlie, entre l’ange et la bête  

Par Maxime Tandonnet

« Je suis Charlie », vous vous souvenez? En janvier 2015, à la suite des attentats terroristes contre Charlie hebdo, tout le monde devait être Charlie.
On se battait devant les kiosques pour acheter Charlie, des millions d’exemplaires étaient écoulés, une fortune accumulée.
Une marée humaine voulait son Charlie.
Cela signifiait, bon, ouvert, tolérant, moderne, jeune, bon, généreux.
Dans l’ivresse des bons sentiments, l’euphorie unanimiste, le matraquage médiatique et la manne des millions d’euros, il fallait « traiter » (bannir) ceux qui n’étaient pas Charlie, ceux qui n’avançaient pas avec la troupe.
Le peuple uni était dans la rue avec Charlie.
Aujourd’hui, neuf mois plus tard, Charlie se vautre dans le salace.
Franchement, je ne parle même pas du Général, ni de Nadine Morano, mais qu’il y a-t-il de plus ignoble que de se moquer du handicap mental, de la trisomie? Rire de tout?
Oui, mais là , on ne rit pas, on vomit.
S’en prendre au chagrin et à la dignité des parents, à la fragilité et à la faiblesse de l’enfant touché par le handicap.
L’humour et la moquerie sont deux notions différentes.
Se moquer d’Anne de Gaulle, symbole de la France martyrisée des années 1940, est une ignominie.
Il est tellement plus facile et moins risqué de s’attaquer à Anne de Gaulle, dans la France d’aujourd’hui, qu’au prophète.
Tourner en ridicule le handicap mental n’a rien de drôle ni d’humoristique.
Cela rappelle les pires époques de l’histoire qui s’en prenaient aux personnes infirmes. « Qui veut faire l’ange fait la bête » nous dit si justement Pascal. Cela fait partie d’une vérité humaine fondamentale, cet éternel basculement du « bien total » incarné par une époque, un parti, un groupe, une croyance, au « mal absolu », à la déchéance et au crime.
Moi, qui me méfie comme de la peste de tous les troupeaux bêlant et de toutes les meutes, des vagues de fièvre, de tous les mots d’ordre, de toutes les modes et de toutes les morales de circonstances, je n’ai jamais été Charlie.
Bien sûr, comme tout le monde, j’ai été bouleversé par les attentats qui ont ensanglanté la France, et notamment celui qui a provoqué la mort d’un intellectuel adorable, que je connaissais un peu, Bernard Maris (il parle de notre rencontre dans son livre posthume sur la France) de deux policiers et de jeunes garçons de confession juive.
Pourtant, je ne suis pas allé aux manifestations et n’ai pas fait la queue devant les kiosques.
Je n’ai jamais aimé Charlie, je n’ai jamais été Charlie, comme on disait à l’époque, et aujourd’hui, j’en suis fier.
Il faut toujours rester soi-même.

 Maxime Tandonnet

  
Maxime Tandonnet

    Ancien conseiller à la Présidence de la République, auteur de plusieurs essais, passionné d’histoire…

*** Attention ce texte est une TRIBUNE LIBRE qui n’engage que son auteur ***

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