Critique des experts: Tous les patients n'ont pas accès à des traitements modernes efficaces
Plus de 3 000 experts discuteront des connaissances les plus récentes sur le diagnostic et le traitement des maladies neurologiques lors du Congrès annuel de la Société Européenne de Neurologie ENS à Nice.
L'un des thèmes majeurs sera la sclérose en plaques.
Environ 400 000 personnes en Europe souffrent de cette maladie inflammatoire chronique qu'est la sclérose en plaques (SEP).
La SEP est l'affection neurologique la plus fréquente chez les jeunes adultes. Chez bon nombre de personnes concernées, cette maladie est toujours identifiée trop tardivement. Avec des conséquences dramatiques, car les études montrent qu'un traitement précoce avec des interférons bêta ou de l'acétate de glatiramère peut freiner sensiblement les processus inflammatoires. Or, les personnes affectées n'ont pas accès aux traitements efficaces dans tous les pays d'Europe, et surtout pas au stade précoce : c'est la critique que formulent les experts lors du Congrès de l'ENS.
«Ce n`est que pour 15 ans qu`on dispose de traitements efficaces contre la sclérose en plaques. Depuis relativement peu d'années, il existe néanmoins des possibilités de traitement qui peuvent être influencées de manière positive pendant le cours de la maladie», rapporte le Prof. Dr. Giancarlo Comi lors de la convention annuelle de Société Européenne de Neurologie (ENS) à Nice.
Ce qui est particulièrement important, c'est qu'on commence le plus tôt possible avec le traitement de la sclérose en plaques (SEP), et surtout avec des mesures contre les processus inflammatoires qui se manifestent dans le cadre de cette grave affection, affirme le Directeur du Service de Neurologie à l'Hôpital San Raffaele de Milan (Italie).
Dans les 28 pays européens (25 membres de l'UE - sans la Bulgarie et la Roumanie - plus l'Islande, la Norvège et la Suisse), environ 400 000 personnes sont affectées par la SEP. «Les traitements efficaces devraient être mis de manière précoce et dans les meilleures conditions possibles à la disposition de tous les malades SEP », réclame le Prof. Comi.
Dans certains pays, les patients CIS sont privés d'un traitement réellement efficace
Or, ceci est loin d'être toujours le cas, critique l'expert. Il y a surtout des problèmes au stade précoce de la SEP, lors de l'apparition de ce qu'on désigne par les « Clinically Isolated Syndromes » (CIS). Les premiers symptômes éventuels d'une SEP sont des troubles de la vision tels que «le voile devant les yeux» ou «voir double» comme conséquence d'une inflammation des nerfs de la vision. Parmi les autres symptômes précoces, il faut aussi citer les troubles de la sensibilité tels que la surdité ou les démangeaisons dans l'un des membres ou une faiblesses des jambes qui est fonction de la charge subie. On parle d'un CIS si la maladie se déclare sous la forme de symptômes individuels de ce type qui sont clairement définis. Les patients CIS courent un énorme risque de voir une SEP se déclarer : chez 90 pour cent d'entre eux, une SEP est diagnostiquée dans un délai de deux ans après l'apparition des premiers symptômes.
«En présence d'un CIS, si on lance déjà le traitement avec des interférons bêta ou de l'acétate de glatiramère, le risque de voir se manifester d'autres lésions nerveuses qui sont irréversibles peut être réduit d'environ 40 pour cent. C'est ce que confirment plusieurs études poussées», souligne le Prof. Comi. «Malheureusement, il y a encore des pays qui ne font pas bénéficier les patients CIS des coûts de ce traitement pour des raisons financières, et qui privent ainsi de nombreuses personnes affectées d'un traitement extrêmement efficace.»
La SEP attaque le système nerveux central, donc le cerveau, la moelle épinière et la nerve optique. Elle est considérée comme une maladie auto-immune ; mais on évoque également un grand nombre d'autres causes possibles. Elle est caractérisée par le fait que les gaines de myéline dont sont enveloppés les prolongements des cellules nerveuses ou axones des cellules nerveuses sont détruites par des attaques des cellules de défense du corps humain lui-même. Par suite de la SEP, des foyers de maladie réparties entre des points «multiples» peuvent se manifester, d'où le nom de la maladie. Par conséquent, la SEP peut provoquer quasiment n'importe quels symptômes neurologiques. Si par exemple le système moteur est affecté par la SEP, cela peut provoquer des paralysies des bras et des jambes pouvant aller jusqu'à une paralysie totale. Les symptômes les plus fréquents sont les spasmes, donc une tension résiduelle accrue de la musculature du squelette, des troubles de la parole et de la déglutition, une tendance à se fatiguer plus vite, des troubles dépressifs, des douleurs et des troubles du fonctionnement de la vessie.
Un risque réduit de 30 à 70 pour cent grâce aux agents actifs modernes
Parmi les agents actifs utilisés pour le traitement de la SEP, les substances immunomodulantes ont fait leurs preuves : il s'agit de substances qui modifient les fonctions du système immunitaire du corps. Pour le traitement de base, on utilise les interférons bêta et l'acétate de glatiramère. Pour ces agents actifs, de vastes études d'application ont montré qu'elles réduisent généralement de 30 à 50 pour cent le risque de survenance d'autres poussées de maladie. Lors du Congrès de Nice, le professeur Comi et ses collègues des Etats-Unis, de l'Allemagne et de la Suisse, présenteront des données de la première grande étude par laquelle on a comparé directement l'efficacité des deux catégories de substances, au moyen d'enregistrements par résonance magnétique (RM) du cerveau. Pour bon nombre des paramètres comparatifs, ces deux approches de traitement ont démontré une efficacité similaire, rapporte le professeur Comi. Concernant la réduction des lésions du cerveau montré par RM, l'interféron bêta donne de meilleurs résultats.
Au stade initial, la SEP procède généralement par poussées : on parle alors de «SEP remittente évoluant par poussées». Après l'affaiblissement des poussées inflammatoires aiguës, les symptômes peuvent alors refaire leur apparition, du moins en partie. Par la suite, la SEP devient alors fréquemment «secondaire progressive». Cela signifie que l'état des patients évolue donc de manière progressive, tout comme dans la forme primaire de SEP, mais il se dégrade alors de manière lente mais continue.
Un nouvel agent actif qui peut retarder de manière encore plus poussée - allant jusqu'à 70 pour cent - l'évolution de la maladie, c'est le Natalizumab ; ce médicament fait néanmoins courir également un risque de graves effets secondaires. Par conséquent, lors du Congres de Nice, cette substance n'est recommandée par l`expert français Prof. Christian Confraveux (Lyon) qu'aux patients qui sont résistants aux interférons bêta et à l'l'acétate de glatiramère, ainsi qu'à certains cas d'évolutions particulièrement graves. D'autres scientifiques commenteront dans leur présentation au Congrès de Nice les données issues de plusieurs études du Natalizumab sur environ 30 000 patients : leur résultat est que cette substance a un «profil d'utilité-risque-favorable.»
Dans les formes particulièrement agressives de SEP, on peut finalement conseiller également l'utilisation de la mitoxantrone et la cyclophosphamide. Il s'agit d'immunosuppressifs, donc d'agents actifs qui sont chargés de juguler le système immunitaire du corps.
Plus de 3 000 neurologues de tous les cinq continents à Nice
La SEP n'est cependant que l'une des affections neurologiques dont le diagnostic, la surveillance et le traitement sont inscrits au programme de la convention de l'ENS 2008 à Nice. L'objectif du Congrès 2008 de la European Neurological Society est de présenter l'état actuel de la connaissance sur toutes les affections les plus fréquentes du système nerveux central et périphérique et d'inviter à la discussion à ce propos. «Plus spécifiquement, le thème de la convention, ce sont surtout les mécanismes moléculaires qui déclenchent à leur tour des troubles nerveux inflammatoires, dégénératifs et ischémiques, comme par exemple les maladies d'Alzheimer, de Parkinson, et l'accident vasculaire cérébral ou apoplexie», explique le Prof. Comi. Du reste, l'apoplexie est la principale cause de handicaps durables dans les pays développés du monde.
Au total, plus de 3 000 neurologues provenant de la plupart des pays européens participent au Congrès 2008 de l'ENS à Nice. Les plus gros contingents viennent de l'Allemagne, avec environ 220 personnes, de l'Italie avec environ 140 participants, et de la Roumanie avec environ 130 scientifiques. 75 viennent d'Autriche, environ 65 neurologues de Suisse, et d'autres experts ont suivi l'appel de l'ENS à se rendre sur la Côte d'Azur. Il y aura aussi de nombreux participants des pays asiatiques tels que l'Inde et la Chine, du Moyen-Orient, l'Afrique, de l'Amérique du Nord et du Sud et de l'Australie profitent de cette occasion du symposium de Nice pour actualiser leurs compétences dans cette discipline médicale spécialisée qui évolue très rapidement.
source Alpha Galileo