J’ai écrit une lettre à l’adresse de personne. Une longue et silencieuse lettre, pleine d’espaces inachevés, pleine aussi de tout ce qui n’est que griffure de papier, jamais écriture. Je l’ai commencée il y a si longtemps, cette lettre, que lorsqu’elle arrivera à son terme, je ne me souviendrai plus que de mon passé. Toute vie sera résolue.
J’ai décidé qu’il en serait ainsi de notre pierre tombale. Que ce serait par mots puis phrases accumulées que je paierai ma dette à la mémoire. Je ne veux construire que de l’éphémère en l’honneur de ce qui fut, ou sera. Je renonce à supplier le monde de cesser d’être monde.
Entre nous, j’attends simplement le jour où la lettre deviendra une vie. Pour te l’envoyer enfin.