Mon voisin sympa, vous savez, celui avec lequel je vais boire un coup parfois, figurez-vous que je l’ai croisé la semaine dernière, il revenait avec un grand carton marqué du nom d’une fameuse marque de l’informatique. Surpris et incrédule, je l’interroge, « Tu t’es acheté un ordinateur ? »
Pourquoi ma surprise, me demanderez-vous ? Parce que l’homme, retraité et plus âgé que moi, a toujours exercé un métier manuel sur les chantiers et qu’ayant souvent discuté avec lui, je devine qu’il n’a pas fréquenté l’école longtemps. Alors se retrouver devant un ordinateur, tout d’un coup, dans ces conditions, ce ne va pas être du gâteau pour lui…
Cet ordi, ce n’est pas une idée de lui ou de sa femme, mais de leur fils qui vit éloigné et imagine qu’ils pourraient correspondre via Skype, c'est-à-dire avoir le son et l’image. En théorie, l’idée semble excellente. Mais je me rappelle de mes propres débuts….
Il y a plusieurs dizaines d’années, l’informatique est entrée dans ma boîte, lentement, très lentement. Nous avions une bécane, une seule, plantée au milieu du service. Un gros bouzin avec lequel nous n’effectuions qu’une seule tâche, chacun notre tour selon un planning déterminé par le chef, pour que chacun puisse se familiariser avec cette technologie décoiffante. C’était impressionnant, toutes ces touches, cette manière de travailler nouvelle, la peur de mal faire et de ruiner tout ce qu’avait fait les autres avant moi ou de passer pour le nul du bureau. Mais j’étais encore jeune, j’ai appris – car tout s’apprend – et aujourd’hui sans être un cador exceptionnel, je m’en sers tous les jours et j’imaginerais mal de m’en passer.
Mais revenons à mon voisin. Lui n’est plus jeune, son passé ne plaide pas en sa faveur pour dompter cette machine qui, il faut bien le dire peut logiquement désarçonner. Prenons par exemple, le plus simple, le clavier. Pourquoi les lettres n’y sont elles pas disposées dans l’ordre alphabétique, comme on serait en droit de s’y attendre ? Nous savons pourquoi il en est ainsi et que c’est fait exprès pour être plus pratique, mais le néophyte qui tombe de son arbre, essayer d’imaginer sa stupeur devant ce premier écueil… Et l’ordinateur n’est même pas encore branché !
Aux dernières nouvelles, mon voisin envisage d’acheter une souris, car le pavé tactile c’est vraiment trop dur à utiliser pour ses gros doigts usés par le métier. J’espère qu’il va penser à acheter aussi de la nourriture pour son mulot. Oh ! Hé ! On peut déconner, non ?