Elle ne croisa personne dans l’ascenseur, un authentique clapier à parisiens aux portes grillagées, au plancher mou et aux chaînes grinçantes.
Le hall de l’immeuble et la cour intérieure se révélèrent tout aussi déserts. Marie bénit le ciel, car Nicole, la concierge, ne semblait pas être en faction. Le peu d’âmes qui vivaient en ces murs le savaient fort bien, il était impossible de franchir le seuil sans échanger quelques paroles avec elle, ce qui donnait lieu, les jours fastes, à plusieurs minutes de monologue. Derrière d’opaques rideaux en nylon, plus gris que blancs, qui masquaient parfaitement l’intérieur de la loge et lui permettaient de voir sans être vue, elle guettait les indélicats qui tentaient de se soustraire à l’aumône journalière. Elle surgissait alors en ouvrant la porte à toute volée, ponctuant son intervention triomphale d’un bonjour acerbe. D’une manière générale, celui qui fautait une fois ne réitérait jamais l’offense. Personne n’aimait frôler délibérément l’accident cardiaque.
Cependant, ce matin-là, Marie tenta le diable et trottina silencieusement sous les fenêtres de la loge, d’où aucune lumière ne filtrait. Elle tirait le loquet de la porte cochère, n’utilisant pas le système électrique pour faire le moins de bruit possible, quand Niniche
Sa journée de travail commença par une interminable réunion de suivi, où elle dut disséquer par le menu les projets dont elle était en charge, en justifiant les coûts, les délais et les impacts organisationnels. Il était près de midi lorsqu’elle regagna son poste. Elle alluma son ordinateur et regarda défiler les lignes absconses, blanches sur fond noir, qui annonçaient apparemment que tout allait bien dans l’univers morne de la machine
Elle ne regretta qu’une fraction de seconde sa dose de caféine, exquis poison que son corps réclamait à grands cris
A suivre...