Un thé amer
Par Maxime Tandonnet
Hier, j’ai pris le thé avec un ancien ministre de Nicolas Sarkozy qui voulait me parler en tant qu’ex-conseiller à l’Elysée.
Lui s’attend à une atomisation générale au Moyen-Orient qui dépasse la question de l’Etat islamique daesh, puis une déstabilisation du Maghreb et du Sahel, sous la pression démographique, la misère, le désœuvrement, une poussée vertigineuse de l’idéologie islamiste radicale auprès des jeunesses en perdition.
En raison de la hausse continue des phénomènes migratoires, le mouvement ne peut que se répandre en Europe et particulièrement en France, à travers la ghettoïsation croissante des banlieues.
Selon lui, la vague terroriste n’en est qu’à ses débuts et une guerre civile possible à l’horizon de plusieurs décennies.
Ce n’était pas des paroles en l’air mais le constat d’un homme qui a voyagé, écouté, réfléchi.
Sans doute est-il trop facile d’occulter les menaces qui pèsent sur l’avenir en les évacuant d’une pirouette idéologique: « droitisation », « lepénisation », « ligne Buisson »…
L’angélisme et l’aveuglement volontaire seraient-ils les gages d’une pensée correcte?
Déjà, dans les années 1920, les visionnaires qui annonçaient le retour des haines et une future déflagration européenne étaient traités de réactionnaires.
Cet ancien ministre voulait parler avec moi des solutions possibles. Les remèdes miracles n’existent pas. Les formules ou les annonces ne servent qu’à masquer le vide sidéral de toute vision de l’avenir.
« Déchéance de nationalité », « sortie de l’Europe », « référendum »: partout, de l’extrême droite à l’extrême gauche, les slogans jaillissent comme des leurres destinés à répandre les illusions et à attirer les électeurs.
Le salut passe par un retour à la volonté politique sur le long terme, le travail, la constance dans l’effort pour restaurer l’autorité de l’Etat, la puissance publique, le respect du bien commun, de l’intérêt général et de la notion de vérité. Je crois à « l’Europe puissance », unifiée sur la base d’une volonté politique, la mise en commun de ses forces militaires et économiques afin de reprendre la maîtrise de son destin, et non au repli nationaliste qui me semble suicidaire.
Aucun pays isolé n’a les moyens de prendre en main l’essentiel, les questions à la source, la stabilisation et le développement des régions d’origine.
La force d’un continent rassemblé, de nations soudées entre elles, peut y contribuer. Rien n’est simple évidemment.
Que dire d’autre?
Primaires, degré zéro de la politique
Par Maxime Tandonnet
L’année politique 2016 commence avec les sondages sur les primaires. Le raisonnement est simple: dans le contexte d’une alternance probable en 2017, le vainqueur des primaires de la « droite et du centre » se présente comme le futur chef de l’Etat. M. Alain Juppé, neuf mois à l’avance, aurait pris une sérieuse option pour la victoire finale. Tous les termes de la manipulation sont en place. Les Français sont invités à se prononcer pour des images, des marques de fabrique, des stéréotypes forgés par les médias et les sondages: Juppé « la sagesse », Sarkozy « la droitisation », Fillon « le sérieux », le Maire « la jeunesse ». Que proposent-ils sur l’essentiel, l’avenir de la démocratie en France, la réforme des institutions, la refondation de l’Europe, l’autorité de l’Etat, la sécurité intérieure et extérieure? En quoi se distinguent-ils sur le fond? Personne n’en a la moindre idée. Ces primaires, comme la « présidentialisation » du régime autour de l’idée mensongère et grotesque qu’un homme (ou une femme) fait à lui seul la pluie et le beau temps de tout un peuple, marquent une nouvelle étape dans la dégradation de l’esprit public. J’y vois une imposture, atteinte à l’intelligence populaire. Si rien ne change en profondeur, une transformation radicale du mode d’exercice du pouvoir – dans le sens de la discrétion, de la volonté générale et du bien commun – j’ai la vague intuition que le sort du prochain président sera infiniment pire que celui de l’actuel, qu’il ne finira peut-être pas son mandat et que tout s’achèvera dans la tragédie…
NDLR : Sur cette primaire « ouverte » je vous conseille de lire l’excellent Un jeu de cons en cliquant ICI
Les Misérables
Voilà qui m’avait échappé à la fin de l’année dernière. Une proposition de loi socialiste a été déposée le 16 décembre dernier à l’Assemblée Nationale afin de modifier les règles du temps d’apparition médiatique des candidats à l’élection présidentielle dans la période charnière de trois semaines entre la clôture des dépôts de candidature et l’ouverture officielle de la campagne. La logique de « l‘égalité » du temps de parole serait remplacée par celle d’une prétendue « équité » . Le temps d’apparition à la télévision ou de parole sur les radios serait dès lors calculé sur la base des sondages récents et des résultats des dernières élections. Cette formule est destinée à conforter les trois grands partis du système, lepéniste, républicain et socialiste, au détriment des autres formations et de leurs candidats. Il faut y voir une volonté de confiscation de la représentation, de monopole de la nomenklatura, d’une petite caste déjà outrageusement privilégiée par les médias, qui ne vise qu’à se partager les mandats, les fonctions, les émoluments, les honneurs, les privilèges. Je ne sais pas si cette loi sera adoptée.
Le seul fait qu’elle ait pu germer dans un esprit politicien, socialiste plus précisément, fait froid dans le dos.
Elle témoigne une fois de plus d’un mépris absolu de la démocratie.
Maxime Tandonnet
*** Attention ce texte est une TRIBUNE LIBRE qui n’engage que son auteur ***