Aujourd’hui je veux encore parler d’un métier qui tend à disparaitre, c’est celui de boulanger, boulanger rural, s’entend. Auparavant toutes les communes possédaient une boulangerie, voire deux. C’était un travail pénible. Le boulanger passait une bonne partie de la nuit dans le fournil pour pétrir, façonner, cuire le pain. Tout se faisait à la main. Durant la journée il partait faire sa « tournée » vendre le pain dans les fermes, les hameaux éloignés de la commune et des environs.
Comme je dis souvent, j’ai été élevé au pain de « Tabet » Badet de son vrai nom, boulanger à La Tagnière. Il passait 2 fois par semaine livrer couronnes et gros pains longs. Nous étions nombreux à la maison et il se consommait beaucoup de pain. En fait c’était la base de notre alimentation. Il ne proposait pas plusieurs variétés de pain, comme on trouve maintenant dans les boulangeries; c’était un pain au levain tout simple (farine,eau, sel, levain) mais très bon et qui se conservait facilement plusieurs jours. Avant de repartir il n’oubliait jamais de donner le « bon poids »: c’était un morceau de pain d’environ 150 – 200 grammes qu’il découpait dans une couronne pour compenser un éventuel manque de poids sur la commande. La pesée de la pâte était approximative car il ne disposait pas du matériel sophistiqué utilisés aujourd’hui dans les fournils. C’était aussi un petit geste commercial.
Après son départ à la retraite sa boulangerie ferma. C’est Camille, boulanger à La Tagnière lui aussi, qui reprit sa tournée. Il faisait également un pain qu’on appréciait beaucoup. Camille était un bon vivant, parfois très drôle qui prenait le temps de rouler et fumer une cigarette avec mon père ou d’entrer à la maison boire un canon. Alors, un longue discussion pouvait s’engager, il nous rapportait les potins de la campagne proche ou refaisait le monde avec une philosophie bien à lui. Ce n’était pas triste !
Lorsqu’il cessa, des jeunes boulangers se succédèrent mais aucun ne put faire fonctionner la boulangerie correctement: pénibilité du travail, mauvaise gestion, manque de motivation….Alors ce fut la fermeture définitive.
Et c’est ce qui s’est passé dans toutes les petites communes qui se sont retrouvées sans boulangerie. Souvent elles ont été remplacées par des dépôts de pain alimentés par des boulangers bien équipés en matériel, capables de fabriquer et fournir du pain en quantité importante. Certains assurent encore des tournées et nous nous sommes adaptés.
A suivre L’échange blé – pain