Ikiru : Akira Kurosawa
Kurosawa se plaignait souvent qu’on lui parle sans cesse de ses films d’époques comme si depuis sa consécration à Venise avec « Rashomon » on l’accusait d’alimenter les festivals avec des films « exotiques » dans l’unique but de plaire aux occidentaux. Hors son film préféré était un film contemporain ; « Ikiru » ou « Vivre » en Français. Une perle humaniste sur un simple employé de bureau qui, se sachant condamner, cherche à donner un sens à sa vie. Un film très émouvant (mais pas tire larmes) d’une profonde intelligence. Joué par Takeshi Shimura, acteur sublime à la gueule pas possible. Ça ressort en Bluray dès avril prochain donc si vous n’avez qu’un film Japonais à voir cette année (ou de votre vie) ne cherchez pas c’est celui là.
Chinatown : Roman Polanski
Difficile de choisir mon Polanski préféré entre celui là et « Rosmary’s Baby ». Ce dernier plus baroque est plus ouvertement séduisant que « Chinatown » qui a première vue pourrait sembler comme un simple exercice de style. Cependant il devient de plus en plus fascinant dès que s’y intéresse un peu et se révèle aussi torturé que les autres films du cinéaste proposant de multiples niveaux de lecture.
A la base il y a déjà le scénario magistral de Robert Towne (l’un des plus grands scénaristes d’Hollywood qui, officiellement ou non, a travaillé sur la plupart des grand films des années 70) et qui constitue sans doute la matrice absolue du polar type année 40/50. Tout y est ; le privé désabusé, la belle blonde, une enquête de mœurs qui dégénère en complot. Mais Polanski va y ajouter une bonne dose de perversion et donner une saveur très européenne au film. D’ailleurs le réalisateur Polonais fera preuve d’une obsession quasi maniaque dans sa confection, non sans générer une certaine tension entre lui et Faye Dunaway (l’imprudent, en enlevant un cheveu qui trainait négligemment sur la robe de l’actrice, reçu une belle baffe en guise de réponse).
Conçu bien des années après comme une trilogie (« The Two Jack » la suite officielle que réalisera Nicholson en 1990) « Chinatown » avait l’ambition démesuré de raconter rien de moins que l’évolution d’une ville (Los Angeles) au cours du siècle dernier. L’exploitation de l’eau dans le premier (irriguer le désert et au passage extorquer aux natifs les terres agricoles), le pétrole dans le second, puis la création des autoroutes qui aurait due être l’axe principale du troisième épisode qui ne verra jamais le jour.
Mais c’est au sein du « nouvel Hollywood *» que le film trouve réellement sa place. En effet la fin ultra pessimiste imposée par Polanski colle bien à cette décennie où la fin du rêve hippie tourne au cauchemar (Vietnam, Watergate etc..). Un cauchemar qui a forcement des résonnances avec la propre vie de Polanski et qui irradie le final totalement nihiliste de « Chinatown » où tout espoir est perdu, les salauds gagneront toujours.
*Décennie durant laquelle le cinéaste tel que Coppola, Friedkin, Scorsese, prirent le pouvoir sur les studios, proposant une vision désenchanté de l’Amérique.