Alors que je m’étais programmé une soirée foot-télé bien pépère, loin des flonflons emplissant déjà l’air des quartiers de nos villes en ce jour de Fête de la Musique, un coup de fil d’un pote m’a ramené sur terre : nos amis de Borderline, le fameux groupe qui monte, qui monte, non pas encore au hit-parade, mais dans le cœur de ses supporteurs régionaux, donnait un concert à Triel-sur-Seine. Le petit reporter ne fit ni une, ni deux, armé de son Smartphone en guise de bloc-notes et d’appareil photo, il fila vers la scène et ses artistes.
Posée dans un quartier excentré de Triel – connu seulement d’un GPS très performant – la scène trône sur une petite place aux allures de bled provincial. Un stand de hot-dogs faits maison, des tables et des chaises en arc-de-ciel sous les arbres vénérables ceignant la placette ce qui dégage une zone suffisante pour le public adepte du trémoussage. Des gamins courent partout, des curieux s’approchent, la pluie retient son souffle autant que le notre, la soirée débute.
Un premier orchestre ouvre le bal. Quatre musicos aguerris, dont on m’apprend que le groupe a été remodelé in extremis suite au départ récent de l’un de ses membres, toujours est-il qu’ils s’en sortent sacrément bien avec leurs blues servi par des instrumentistes d’un bon niveau. Longs solos fluides à la Allman Brothers, les morceaux se succèdent, In Memory Of Elizabeth Reed (Allman Brothers), Who knows (Hendrix), Let’s Work Together (Canned Heat)… Un excellent set qui a mis le public en de bonnes dispositions pour la suite.
Puis ce sont nos amis de Borderline qui montent sur l’estrade. Le quintette (Harbin est au chant, Kris et Olivier tiennent les guitares, Alain manie la basse et Jean-Philippe à la batterie) est en forme et impose immédiatement sa joie communicative qui montera crescendo durant les presque quatre-vingt minutes du concert. Dès l’entame, Sweet Dreams (Eurythmique), les spectateurs ne connaissant pas le groupe sont surpris par l’interprétation qui en est donnée. Et c’est bien normal car il s’agit de la marque de fabrique de Borderline : reprendre des titres peu connus d’artistes qui le sont ou bien s’approprier des titres connus de tous pour leur donner un cachet nouveau ; et pour cela deux manières conjuguées, se baser sur une version du morceau réinventée par un autre (ici, le Sweet Dreams dans la version de Marilyn Manson) et une performance vocale de leur chanteur, très personnelle. Et ça marche !
Nous aurons donc droit par exemple, à You Really Got Me (Kinks), Sunday Bloody Sunday (U2), morceau qui sera bissé en rappel et chanté par la foule (Heu ?) en délire, Come Together (Beatles) dans une version plutôt heurtée, L’Homme pressé (Noir Désir), The Creep (Radiohead), très certainement « leur » titre phare tant il s’en dégage à chaque performance une réelle magie,The Man Who Sold The World en hommage à David Bowie… La set-list est variée comme on le voit, un atout supplémentaire pour ce groupe qui a chaque sortie montre de nouvelles qualités, tant en décontraction qu’en maîtrise de son sujet.
Le public bon enfant est tout acquis à la cause des musiciens, les applaudissements ne manquent pas, les demandes de rappels fusent et les filles en folie se démènent, transformant le parking où est plantée la scène en un dance-floor bien sympathique.
Je suis venu, j’ai vu, je vous le dis : hier soir à Triel, il s’est passé quelque chose.