Oana Cambrea - Fear of Light
Tout passe, un bus de ramassage de putains cocaïnomanes passe, un taxi squatté de force par des clodos puants passe, un train d’emmerdes radioactives illégitimement anonyme passe, une caravane d’incultes déguisés en se qu’ils ne seront jamais passe, un étrange attelage plein à raz bord de brutes tatoués jusqu'à l’intérieur du rectum passe et pour finir la série de diapos à la con, une armée d’imbéciles hilares et imberbes comme les fesses d’un bébé passe. Tout passe, il n’y a que cette amère pilule qui refuse de passer, ce gros mensonge, cet appel du pied, cette allusion ou plutôt cette affirmation, cette foi en un monde humain, plus solidaire, égalitaire en un mot meilleur. Ce monde là, entier entre dans sa phase floue, où repères, valeurs, sens, sont sans dessus ni dessous, et pas seulement. Car et avec l’effondrement du foutu, merdique, mur de Berlin, celui ou ceux là même qui l’est érigé des deux cotés du rideau de fer applaudissent de concert, se félicitent des dizaines d’années après de sa démolition. Une mascarade en apparence mais une réelle délivrance, une fête faite sur le cadavre encore chaud des idéologies prêtes à être définitivement ensevelies afin que renaissent de leurs cendres les religions longtemps écartées du champ politique et du retour aussi de l’amour primaire, la fierté primitive de l’appartenance à un minuscule bout de terre. Alors de ce marasme général qui se ramasse au bulldozer, et s’amasse comme de la neige mélangée à de la boue au début de la fonte, ma colère, ma rage se transforme en une appréhension diffuse, de doute et de visions si noir prête à dégouliner de toute part, de mon être, par tout, éclaboussant, salissant tous ce qui la touche car le temps est à la salissure, au retour aux ténèbres, à l’illettrisme, au mauvais gout généralisé et à l’abrutissement totale …