![Pour tout dire (13) Pour tout dire (13)](http://media.paperblog.fr/i/816/8163722/dire-13-L-c7_gXd.jpeg)
À propos de la quête d'un mythique grand langage oublié qu'il incomberait à l'écrivain de revivifier. Ce qu'en dit William Faulkner, qui s'estimait un poète raté, et ce qu'il en disait de Thomas Wolfe.
Y a-t-il un langage qu'on puisse dire total ? Est-elle du ressort humain, telle langue qui, dans la forme la plus concentrée et la plus intelligible à la fois, ferait la somme de tout ce qui peut s'exprimer ? Comment saisir, par la parole, les hantises les plus obscures de l'homme, et comment signifier ses aspirations essentielles ?
Dans son acception la plus large, seule la poésie relève ce défi, qui tend à résumer " toute l'histoire du cœur humain sur une tête d'épingle ", selon l'expression de Faulkner qui concevait lui-même la poésie comme un " moment émouvant, passionné de la condition humaine distillée jusqu'à son essence absolue ". " Je voulais être poète, affirmait-il lui-même, et je me considère aujourd'hui comme un poète manqué, pas du tout comme un romancier mais comme un poète manqué qui a dû se contenter de ce qu'il était capable de faire. "
Or son œuvre peut être envisagée comme un seul vaste poème visant à " montrer l'homme en conflit avec ses problèmes, avec sa nature, avec son propre cœur et avec ses semblables ".
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Si l'aspiration à jamais inatteignable du poète est de TOUT DIRE, il me semble révélateur que Faulkner lui-même se soit attaché à faire parler ceux qui, justement, ne peuvent s'exprimer ou en sont réduits à des balbutiements.
Dans l'incantation obscure de l'idiot ou de l'ensauvagé, il s'est mis à l'écoute du parler humain à sa source confuse et s'est attaché à transcrire une espèce de " langage sous le langage " qui rejoint à la fois les tâtons extrêmes du Joyce de Finnegan's Wake ou du Céline de Guignol's band et la recherche éperdue de Thomas Wolfe : " Ô déserts où l'on se perd en des labyrinthes incandescents, sous les étoiles, perdus sur cette terre de cendre grise et terne, perdus ! Muets devant nos souvenirs, nous cherchons le grand langage oublié... "