Depuis deux mois, je suis une maman de deux petits. Je dis « les enfants », je dis « sa soeur », « ton frère » et je trouve encore ça bizarre à chaque fois. Je me partage, je pense à eux deux, ils sont dans ma tête et dans mon coeur et Joseph y a pris sa place tout naturellement aux côtés de Rose.
Je me suis suffisamment posée de questions et inquiétée avant pour avoir envie de vous faire partager mon expérience, et peut être rassurer quelques futures mamans de deuxième.
Avant
Mes premiers pas avec Rose n’ont pas toujours été faciles. Comme toute jeune maman, j’ai réalisé les changements qu’impliquaient la parentalité. Au-delà de l’organisation, des couches et des rhumes j’ai surtout dû apprendre à faire avec cette « case en plus ». Celle qui fait que l’on pense désormais à soi après, et que l’amour et l’inquiétude, indissociables, allaient faire partie de moi pour toujours. Celle qui fait aussi que l’on se remet en question, que l’on va chercher au fond de soi qui l’on est vraiment pour devenir mère. Bref, la métamorphose.
Alors, quand nous avons commencé à parler d’un deuxième enfant, je n’étais pas très confiante. J’avais peur de repasser par une période difficile, j’appréhendais la grossesse, les suites de couche, l’allaitement, les nuits presque blanches. Mais le désir d’enfant étant ce qu’il est, nous nous sommes lancés. J’ai parfois eu l’impression de trahir Rose, de lui faire « un bébé dans le dos », mais je suis restée convaincue tout le temps qu’un petit frère ou une petite soeur est un cadeau, qu’ils seraient plus forts, plus beaux, à deux. Nous ne savions pas vraiment à quoi nous attendre, mais nous nous savions plus expérimentés, et j’ai fini ma grossesse plutôt confiante.
Les premières semaines
Joseph est né un mardi matin, et l’après-midi même Rose est venue le rencontrer. J’avais imaginé cette scène mille fois pendant ma grossesse, je rêvais de ce moment. Je voyais Rose se penchant sur le berceau, surprise, émue .. et évidemment ça ne s’est pas passé comme ça. Quand elle est arrivée, Joseph était sur moi, la cicatrice de la césarienne m’empêchait de m’asseoir, je n’ai pas pu prendre Rose dans les bras, à peine lui faire un bisou. C’est François qui les a pris avec lui tous les deux, et Rose était toute perturbée, ne sachant pas comment réagir ni se poser.
Une fois rentrés à la maison, entre la fatigue, les douleurs, le baby-blues, les colères de Rose et les nuits plus qu’hachées j’ai une petite phase de découragement. Je me dis qu’on est fous, que je n’y arriverai jamais avec deux enfants.
Je m’en veux quand je vois que Rose explose à l’intérieur, qu’elle souffre de nous voir aimer un autre petit être et qu’elle ne sait pas comment réagir. Et surtout, surtout je m’en veux de penser que j’étais mieux à la maternité. Je me sens coupable d’avoir envie de profiter de mon nouveau bébé et de me sentir soulagée quand ma grande est à la crèche. Je suis dans ma bulle de jeune accouchée, j’ai du mal à penser à quelqu’un d’autre qu’à Joseph. J’ai beau savoir que c’est normal, et même bien pour lui, je voudrais réussir à ma partager équitablement entre les deux. Je voudrais avoir envie de passer de temps avec Rose mais non … Elle se jette au sol à la moindre contrariété, crie, pleure et je n’ai pas la force de la canaliser et de prendre le temps qu’il faudrait pour elle. J’ai la sensation que je dois forcement « sacrifier » un de mes enfants pour pouvoir prendre soin de l’autre.
Et puis …
L’apaisement
Les semaines passent et la vie à quatre s’installe.
Je guéris physiquement, je peux à nouveau aller au parc, au café, faire des balades et cela nous aide à passer de bons moments en famille.
Rose s’apaise, elle s’intéresse de plus en plus à son petit frère. Elle l’observe, veut le toucher et le porter. Elle me regarde m’occuper de lui puis va chercher sa poupée pour l’allaiter, lui essuyer la bouche ensuite et la bercer en chantant. Elle accepte plutôt bien que je partage mon temps entre eux deux du moment qu’elle est prévenue. Si je prépare Joseph pour son bain elle vient me demander si ensuite ce sera son tour. Je prends donc l’habitude de lui donner le programme « Je fais manger Joseph et puis je te lis une histoire … ». D’ailleurs, elle nous demande souvent de lui lire « Et après il y aura » de Jeanne Ashbé qui est exactement sur ce sujet, et que je conseille à tous les parents de plusieurs enfants.
En revanche, si elle accepte que je sois la maman de deux enfants, c’est plus compliqué avec son père. Elle sait bien que Joseph est mon bébé, elle sait qu’il était dans mon ventre, mais elle ne veut pas partager son papa. Et donc, dès qu’il parle ou s’approche de Joseph nous entendons un tonitruant » Non ! Pas le papa du bébé !! ». A force d’explications et de réassurance, la pilule passe, et elle nous répète « MON papa … et le papa de Joseph ». Oui, ma chérie, c’est bien ça !
De mon côté, malgré la fatigue et les petits soucis du quotidien je me sens en forme et avec un super moral. Bien plus forte et rassurée que lors des premières semaines de Rose. Je peux enfin croire ce que l’on ma répété pendant toute ma grossesse : le deuxième c’est plus facile ! Je ne pensais pas pouvoir être cette nouvelle maman là, détendue et confiante, mais si ! Bon, on ne se refait pas et j’ai des angoisses idiotes de temps en temps, mais je suis sûre de moi, et ça fait un bien fou ! Le baby-blues ne m’aura eu que quelques jours, et j’ai l’impression que la naissance de Joseph a beaucoup de sens, qu’elle a fini de faire de nous une famille complète, et de moi une maman posée et assurée.
Finalement, comme pour un premier bébé, il faut traverser une phase d’adaptation et de rééquilibrage, mais chez nous elle aura été plutôt rapide. Je sais que j’aurai encore (et sûrement pendant des années) des moments de découragement, quand l’un a faim pendant une promenade et que l’autre s’assoit sur le trottoir en refusant catégoriquement de bouger un orteil, un exemple au hasard … mais je sais aussi que je peux le faire.
Maintenant je me demande bien ce qui nous avait paru si difficile avec un seul bébé, puisque je me repose quand je suis seule avec Joseph (et là j’entends ricaner les parents de trois et plus … oui oui je sais). Mais on y arrive et même on se regarde avec amour et fierté quand on les voit se câliner et échanger leurs premiers sourires.