- Les croisades :
La Quête du Graal, est une conséquence des croisades, le fruit de la défaite : la perte de Jérusalem ( reprise par les musulmans en 1187, lancement en 1189 de la 3ème croisade).
« La perte de Jérusalem ébranle toute la Chrétienté et l'oblige à faire une sorte de retour sur soi, à modifier radicalement sa conception de la croisade.
A la conception externe, si l'on peut dire, guerrière et conquérante, va se substituer une conception interne, allégorique et mystique ; Jérusalem ne sera plus un but de pèlerinage lointain et périlleux : la Jérusalem céleste prévaut dorénavant, qui ne se conquiert pas au terme d'une expédition terrestre, mais se trouve au terme d'un cheminement spirituel.
Il va de soi que la notion de « Jérusalem céleste » est bien antérieure à 1187, mais depuis un siècle l'Occident semblait l'avoir quelque peu oubliée, axé comme il était sur la conquête et la défense purement guerrières des Lieux saints. »
Helen Adolf (1895 – 1998) was an Austrian–American linguist and literature scholar.
- La légende arthurienne ( ou Matière de Bretagne) :
Avec 'Joseph d'Arimathie' de Robert de Boron, nous revenons sur nos terres ; le Graal, en effet, part de ''Terre sainte'' pour l'Occident sans espoir de retour.
Nous pouvons ainsi rapprocher de chaque actualité de croisade, une œuvre :
Le ''Perceval'' à la croisade de 1177/78 de Philippe d'Alsace, le '' Joseph d'Arimathie '' à la défaite de 1187, et le '' Parzival '' au traité de paix de 1192 ( fin de la 3ème croisade – Jérusalem reconquise, paix entre Richard 1er et Saladin.)...
En 1185 environ : Chrétien de Troyes entreprend son Conte du Graal ou Perceval que sa mort laisse interrompu. II écrit ce poème pour Philippe d’Alsace, comte de Flandre, prince dévot qui s’est croisé plusieurs fois ( en 1177, et 1190) et qui détient à Bruges la relique du Saint Sang, ramenée d’Orient peu avant 1150 par son père Thierry d’Alsace.
Gautier de Montbéliard (mort en 1212, est un fils d'Amédée II de Montfaucon, comte de Montbéliard), s’engage dans la quatrième croisade, en 1199 il est régent de Chypre de 1205 à 1210, connétable du royaume de Jérusalem de 1210 à 1212. Gautier est le commanditaire attesté de la trilogie de Robert de Boron (qui comporte le Joseph d’Arimathie, un Merlin et un Perceval) rédigée autour de 1200. Robert de Boron, à Chypre, découvre la littérature byzantine et syriaque. La famille de Boron pourrait être alliée à celle ''des Barres'', qui comptait des membres ayant commandé en Orient et même un Grand Maître du Temple.
Enfin, Wolfram d’Eschenbach (v. 1210) écrit Parzival (source de Richard Wagner). C’est en gros, la même trame narrative que le Conte du Graal, avec peut-être des apports occitans (Wolfram prétend corriger Chrétien grâce au texte – perdu – d’un certain Kyot le Provençal) et orientaux (présence du Sarrasin Feirefiz, éléments doctrinaux peut-être empruntés au philosophe islamique Al Farrabi). Ici, le Graal est devenu une pierre précieuse sur laquelle, chaque jour, une colombe dépose une hostie. Perceval se marie, fonde une lignée (il sera l’ancêtre de Godefroi de Bouillon) et confie le Graal à la garde de l’ordre du Temple.
Wolfram d’Eschenbach, chevalier franconien, tient secrète l’identité du commanditaire. Le roman de Wolfram est chargé de mysticisme, de référence au Moyen-Orient des croisades... Sa version de la quête du Graal, Parzival, puis son Titurel donnent au mythe une sonorité ésotérique beaucoup plus prononcée que chez Chrétien de Troyes : le Graal est gardé par des Templiers, et il est réservé à quelques « élus » de s'en approcher, élus liés par une lignée commune.