Bon, on fait un break du décompte de mots spécial "ouikend normand", parce que là, à chaud, faut que je raconte un truc qui me hérisse les poils.
La scène se déroule au boulot, pendant mon entretien d'évaluation avec mon chef (si, si, vous savez, le genre de truc désagréable au possible pasqu'on sait jamais si c'est l'occasion annuelle de se prendre dans la tête un listing de 100 pages de reproches dont on n'a jamais entendu parlé en 364 jours, ou si c'est juste l'occasion annuelle d'apprendre que parmi ses objectifs de l'année suivante figure le retour de la croissance en France et la fin de la famine en Afrique).
En face de moi, donc, mon chef.
Alors dans le genre, mon chef, c'est un beau stéréotype de fonctionnaire, un modèle qui ne se fait presque plus (si, si, soyons optimiste).
Le genre à prendre des vacances sans que cela soit décompté de ses congés (c'est vrai qu'on en a si peu, des congés, dans la fonction publique...).
Le genre à faire d'harrassantes journées de travail entre 11h du matin et 17h, avec 2 heures de pause déjeuner au milieu. Journées composées essentiellement de coup de fil personnels, de préférence à l'étranger, bien sûr.
Le genre obligé de s'approprier le travail des autres parce qu'en matière de production personnelle, ben... non, désolée, je ne vois pas de quoi vous voulez parler.
Le genre à faire payer par la sécu ses dispendieuses cures thermales de confort.
Le genre qui a vécu et bossé en Afrique pendant des années, et qui en a déduit de grandes vérités générales assenées avec la force de l'expérience : "Tous des nuls-incapables-poligames-mangeurs d'enfants qui vivent au crochet des aides au développement que c'est nous qui les payons alors, hein, merde" (non, j'exagère pas)(sauf peut être pour le coup de manger les enfants).
Le genre parasite inutile, quoi.
Au milieu de l'entretien, une petite allusion au débat des candidats d'hier soir fuse.
Terrain miné, je me contente d'un haussement de sourcils.
Mais le chef insiste et là, c'est le drame :
"Ah mais moi de toutes façons je vote Sar*ko, hein. D'ailleurs je suis fier de moi, en deux jours, j'ai convaincu trois indécis. Ben oui, c'est évident, si Ség*o passe, le pays est foutu, plus personne ne voudra bosser."
Alors, là, comment vous dire.
Ben c'est assez surréaliste, en fait, de s'apercevoir que le pire glandeur que cette terre ait porté, une personne qui vit sur votre dos et le mien (oui, oui, les impôts, c'est aussi à ça que ça sert : le salaire des fonctionnaires) se fasse le porte parole du type qui prône la valeur "travail" toute les phrases et demi.
En fait ça serait presque à hurler de rire. Ou fondre en larme, je ne sais pas trop.
Alors j'ai respiré par le ventre pour éviter la Hulkisation immédiate. J'ai grimacé un truc bizarre et relancé le sujet sur mes p... d'objectifs 2007.
Comme quoi mon courage politique et éthique a ses limites hein.