Fyfe's Graal

Publié le 21 juin 2007 par Fyfe
Il y a quelques différences fondamentales entre le Chéri et moi.
Par exemple, moi j'aime bien prévoir à l'avance mes week-end, mes sorties, etc. alors que lui est stressé à la seule perspective de devoir réfléchir au menu du dîner de tout à l'heure.
Par exemple, quand je m'occupe d'organiser un week-end chez mes parents, je me transforme en logistic-woman, je fais des réservations de billets de trains 2 mois à l'avance (ouais enfin, j'essaye, histoire que le tgv ne nous coûte pas un rein à chaque fois, on n'en a pas tant que ça, à nous deux, des reins), je me débrouille pour arriver à la gare suffisamment à l'avance pour acheter de quoi nous sustenter, pour traîner dans les rayons des magasines, avec des cas de conscience déments type : Glamour ou bien le Canard Enchaîné ?
Ceux qui me lisent depuis un petit moment savent que je suis une psychopathe des transports, et que ça ne m'empêche même pas de faire d'énormes boulettes parce que j'ai un cerveau de moineau étourdi.
En revanche, quand le Chéri s'occupe d'organiser un week-end chez ses parents, c'est une autre histoire.
Trois jours avant le départ - au mieux - il commence à chercher des billets de train sur internet.
Evidemment tout est complet. Ca sera donc un billet sans réservation.
Avec obligation d'arriver une bonne demi-heure en avance à la gare pour se précipiter sur les places assises entre les wagons, les seules qui ne sont pas réservables.
Si je vous dis que l'idée de devoir se battre contre d'autres voyageurs tout aussi désespérés que moi à l'idée de passer 3 heures debout me fait faire des cauchemars plusieurs nuit à l'avance, vous mesurez l'étendue de ma psychorigidité?
En général, je prends sur moi et je ne fais pas de commentaire (ou si peu), parce que bon, c'est pas comme si j'avais envie de m'en occuper moi-même, hein.
Mais l'arrivée à la gare vendredi soir, bien en avance comme prévu, a fait monter la tension d'un cran.
Des dizaines de personnes attendaient patiemment sur le quai l'ouverture des portes, devant chaque wagon, sur les 4 kilomètres de la longueur du train (au bas mot).
A leur mine déconfite, impatiente, et agressive (oui, tout ça à la fois), je soupçonne certains d'avoir quitté leur domicile dans la nuit pour pouvoir prendre place sur le quai avec les premiers rayons du soleil.
Pendant que le Chéri fait la queue au guichet pour un échange de billet (une sombre histoire de tarif réduit auquel on n'a pas droit, je n'en sais pas plus et refuse catégoriquement de m'en préoccuper, j'ai suffisamment à faire avec mon propre stress), il m'envoie en éclaireuse sur le quai, à la recherche de places assises. J'accepte la mission, et me lance dans cette quête du Graal SNCFique.
Partant du principe bien connu du "plus c'est loin, moins y'a de monde", je me tape les 4 kilomètres de quai et me plante devant la porte, en jaugeant les voyageurs qui sont déjà là, ou qui nous rejoignent.
Bon, la petite vieille, elle devrait pas être trop dure à pousser sur les rails, mais elle est maline, la bougresse, elle s'est installée à 2 cm du bouton d'ouverture de porte.
Nan, j'déconne, hein, c'est pas mon genre de tuer des petites vieilles.
Alors que le petit couple bécébégé, je pense pouvoir les éliminer assez facilement avec un croche-pied bien senti, vu le nombre de valises qu'ils ont.
Ok, ok, je blague.
En vérité, je suis tellement stressée et déprimée à l'idée de ce voyage pourri que c'est moi que je jetterais bien sur les rails.
Mais tiens, voilà le Chéri. Après tout, c'est de sa faute si... Non, calme toi Fyfe.
Par un mystère que je ne pense pas pouvoir élucider un jour, et après un parcours d'environ 2 kilomètres en sens inverse le long du train, nous nous retrouvons finalement assis. Sans être bien sûrs que les places ne soient pas réservées, mais je m'en fous, Graal is mine.
Débarrassée de ce poids pesant (si je veux je dis qu'un poids peut être pesant, parfaitement), je peu enfin me laisser aller et sortir un bouquin. Plouf plouf, ça sera celui d'Hélène. Cooooool.
Ah mais non mais c'est pas possible.
J'ai faim.
Là, maintenant tout de suite, je VEUX manger. Et croyez moi, on ne rigole pas avec ça.
Moi, innocemment : "Chéri on arrive à quelle heure ?"
Lui, naïvement : "Vers 22h30 je crois"
Moi, inquiète : "Et on mange quoi ?"
Lui, inquiet aussi : "Ben... On pourra grignoter en arrivant chez mes parents"
Moi, les yeux revolver (copyright Marc Lavoine) : "Tu blagues, là ?"
Lui, essayant de se cacher sous son siège : " Ben moi j'ai pris un sandwich en sortant du boulot, j'avais pas eu le temps de déjeuner, alors là, j'ai pas faim en fait"
Immédiatement, je visualise la seule source de nourriture du train : un distributeur de M et Nems.
Ha ha nan c'est pas possible ça.
Tout de suite après je visualise la gare : un guichet, un kiosque à journaux qui vend trois paquets de gateaux.
Si, si, ça existe, une gare comme ça à Paris, moi non plus je n'y croyais pas avant de la voir.
Le train part dans 15 minutes.
Le Chéri, qui me connaît bien, sent que je vais exploser ou sangloter, au choix. Dans tous les cas, le ouikend est plutôt mal engagé.
Il propose d'aller acheter des trucs à la gare. A 2 kilomètres, donc, si vous avez suivi.
Je refuse, arguant avec une certaine mauvaise foi (mais surtout une vraie angoisse quand il s'agit d'horaires) qu'il n'aura pas le temps, que le train partira sans lui, que moi je ne veux pas partir sans lui (la perspective d'une soirée seule avec mes beaux parents ne m'enchante guère, comprenez moi), que peut-être des gens vont arriver pour prendre nos places et alors on ne se retrouvera jamais plus jamais, surtout qu'il n'a pas de téléphone portable, que... Attention, là, la Fyfe est en mode panique ridicule.
Le Chéri est trèèèès compréhensif, et au lieu de se moquer, tente de me rassurer, me promet qu'il sera de retour à temps, et file en courant.
Je commence à agiter fébrilement mes jambes.
5 minutes...
Et si il y avait la queue au kiosque ?
6 minutes....
Non, mais là, j'le sens pas, hein.
6 minutes et 30 secondes
"Mesdames Messieurs, vous avez pris place à bord du train corail"
Nooooooooon !!!! Quand ils disent ça, c'est qu'on va démarrer, hein ??? Je jette des regards de biche égarée (genre maman de Bambi juste avant l'accomplissement de son funeste destin)
7 minutes, le Chéri arrive, tout sourire, les bras chargés de nourriture.
Ouf.
Mon calvaire est enfin fini, je peux remplir mon estomac, le train part, je suis saine et sauve, tout va bien, mon coeur reprend un rythme normal, je peux enfin me moquer de moi-même et remercier le Chéri pour ses efforts.
Bon, j'ai raconté les 30 premières minutes de mon week end en 1135 mots. Nan je suis pas bavarde, j'ai juste une vie passionnante.
Si mes calculs sont bons, il me faudra 163 440 mots pour finir de vous raconter le week end normand.
Nan mais partez pas, hein, ça va être trop fun, la preuve, ça commence avec la lecture des bouquins des siouper-courges (hin hin, quel surnom terrible).