Robot sous-marin Echo Voyager de Boeing. Source : Boeing
En octobre 2016, la marine royale du Royaume-Uni a accueilli Unmanned Warrior, un exercice massif avec 18 nations qui s’est concentré sur des opérations impliquant des drones aériens, terrestres et maritimes. Popular Mechanics a qualifié l’exercice de « plus grand jeu de guerre de robots du monde », il a beaucoup mis en avant une classe émergente de systèmes sans pilote : les drones sous-marins (unmanned undersea vehicles (UUV) ou autonomous undersea vehicles (AUV)). Car les stratèges, notamment aux Etats-Unis, pensent que la guerre de demain se jouera aussi dans les profondeurs. Aussi, le développement de tels systèmes est une priorité majeure pour la marine américaine et d’autres dans le monde. Selon l’Autonomous Undersea Vehicle Applications Center, une organisation de défense de l’industrie à but non lucratif, il existerait 255 UUV en service aujourd’hui, issus de 147 plates-formes différentes. Il y a deux types de sous-marins non pilotés : les véhicules sous-marins commandés à distance (ROV) et les véhicules sous-marins non habités (UUV). Les ROV sont généralement des véhicules connectés qui sont pilotés par des membres d’équipage en surface, tandis que les UUV ne sont pas connectés et sont conçus pour fonctionner pendant de plus longues périodes et à plus grandes distances de l’opérateur que les ROV.
Développement ancien
Depuis la fin des années 1950, des drones sous-marins sont développés aux Etats-Unis. Plus récemment, des drones sous-marins ont été envoyés à plusieurs reprises pour aider à la recherche des débris du crash du vol Malaysia Airlines 370. Dans les années 1990, après que deux navires de la marine des États-Unis eurent été gravement endommagés par les mines irakiennes dans le golfe Persique lors de l’opération Tempête du désert, la marine américaine a commencé à investir massivement dans la lutte antimines et a lancé un programme pour construire des UUV qui pourraient désamorcer les mines ennemies. L’US Navy a besoin de systèmes qui pourraient éviter la détection en opérant sous l’eau et en avance des navires de déminage de surface. Avec le Plan directeur des véhicules sous-marins non-pilotés en 2004, la Navy a établi neuf priorités pour la future capacité des UUV, allant de la guerre anti-sous-marine à l’approvisionnement et même à des missions de frappe. Parmi les drones sous-marins les plus répandus, il y a la famille d’UUV Remote Monitoring Unit (REMUS). Pendant l’opération Iraqi Freedom en 2003, un REMUS 100 UUV a été utilisé pour aider à éliminer des mines dans le port d’Umm Qasr, marquant la première fois qu’un UUV était déployé dans un environnement de combat. Les contre-mesures contre les mines (MCM) restent la priorité absolue des programmes UUV de la Navy.
Un Remus 100. Source : Hydroid
350 millions de dollars
Au cours de l’exercice 2017, le ministère de la défense américain devrait dépenser au moins 350 millions de dollars pour l’achat et la recherche sur les drones sous-marins.
Cependant, la marine et d’autres départements du Pentagone consacrent beaucoup plus de fonds à la recherche sur la prochaine génération de systèmes et de technologies UUV. Le plus important de ces programmes de recherche concerne Large Displacement Unmanned Undersea Vehicle (LDUUV ou drone sous-marin à grand déplacement) et le très grand UUV (XLUUV). Contrairement aux UUV destinés à une mission spécifique comme la détection des mines maritimes, ces UUV de grande taille sont conçus pour avoir plusieurs types de mission, y compris les capacités de collecte de renseignements et la livraison de charge utile. La différence essentielle entre le LDUUV et le XLUUV tient au fait que les LDUUV, comme les UUV existants, sont destinés à être déployés à partir de navires de la marine, tandis que le XLUUV peut être déployé à partir d’une base de la marine et fonctionner indépendamment d’un navire hôte.
En prévision de la demande de la Navy pour les grands UUV, certaines entreprises investissent déjà de manière indépendante des fonds de recherche pour développer la prochaine génération de drones sous-marins. En mars 2016, Boeing a dévoilé l’Echo Voyager, un énorme UUV de 15 mètres de long qui pourrait fonctionner de manière autonome pendant des mois. Au-delà du développement d’UUV plus importants, une attention est mise sur l’amélioration de la capacité des systèmes non habités à communiquer et à opérer entre les domaines aériens, terrestres et sous-marins. Ainsi, des hélicoptères sans pilote comme le MQ-8 Fire Scout pourraient travailler avec des véhicules non habités et des véhicules sous-marins pour accomplir la même mission tout en gardant les opérateurs humains hors de danger.
Un AUV SeaCat. Source : Atlas Elektronik GmbH
Les progrès récents dans la technologie UUV, leur caractère plus abordable et les intérêts géostratégiques sont parmi les facteurs qui suscitent l’intérêt pour les drones sous-marins aux Etats-Unis et ailleurs. D’autres pays poursuivent des programmes d’UUV. En 2014, le Yomiuri Shimbun a rapporté que le Japon et les États-Unis collaborent sur un UUV de 10 mètres de long qui serait utilisé pour patrouiller de façon autonome. Un rapport de la RAND sur les drones chinois a publié cette année a révélé que Pékin finance au moins 15 programmes de recherche universitaires différents sur des drones sous-marins et de surface. Une émission russe en novembre 2015 a confirmé les soupçons selon lesquels la Russie construisait un UUV de longue portée capable de transporter une ogive nucléaire. Enfin, en octobre 2016, le Royaume-Uni et la France ont annoncé qu’ils avaient attribué un contrat de 164 millions de dollars à un groupe d’entreprises européennes de défense pour développer un drone sous-marin destiné aux contre-mesures contre les mines.
Le futur de la guerre dans les abysses se prépare intensivement…