Six ans après le déclenchement des hostilités, la première bataille judiciaire entre Apple et Samsung va bientôt trouver son épilogue. Mardi 11 octobre, les deux rivaux se sont en effet retrouvés devant la Cour suprême des Etats-Unis, la plus haute juridiction du pays. En jeu: le montant des réparations versés par le groupe sud-coréen, condamné en 2012 pour violation de brevets. Mais pas seulement. La décision des huit juges de l'institution aura aussi un impact important sur l'ensemble du secteur technologique.
399 MILLIONS DE DOLLARSLe conflit remonte à avril 2011, avec le dépôt d'une plainte par Apple. En août 2012, au terme d'un procès très médiatisé, Samsung avait été reconnu coupable d'avoir violé plusieurs brevets, portant notamment sur des éléments de design (coins arrondis, grille d'applications...). Il avait été condamné à verser 1,05 milliard de dollars de réparations financières. Le début d'une interminable série d'appels et de recours. En 2013, le montant des dommages avait ainsi été ramené à 930 millions en raison d'erreurs de calculs. Puis à 548 millions en mai 2015.
Sur cette somme, Samsung espère encore obtenir l'annulation de 399 millions de dollars. Le groupe sud-coréen fait valoir que plus de 250.000 brevets différents sont utilisés dans la conception d'un smartphone. Et donc que les brevets incriminés n'ont joué qu'un rôle mineur. D'autant plus que certains d'entre eux ont depuis été jugés invalides par l'USPTO, l'organisme américain chargé des brevets. Apple assure au contraire que le succès de la gamme " Galaxy " de son concurrent est directement lié à son apparence, copiée sur celle de l'iPhone.
LOI DE 1887L'an passé, une Cour d'appel avait débouté Samsung, qui réclamait un nouveau procès. En décembre, trois ans et demi après sa condamnation, le premier fabricant de smartphones avait ainsi dû verser les 548 millions de dollars dus à Apple. La Cour suprême constitue son dernier espoir d'obtenir un remboursement partiel. Les juges devront se prononcer sur la pertinence actuelle d'une loi datant de 1887, qui attribue au plaignant l'ensemble des profits réalisés par un produit qui enfreint un brevet relatif au design.
Les conséquences du jugement, qui n'est pas attendu avant 2017, dépasseront donc le simple cadre du conflit opposant Apple et Samsung. L'ensemble du secteur technologique sera concerné. Le groupe sud-coréen a ainsi obtenu le soutien de Google, Facebook et plusieurs autres sociétés de la Silicon Valley. Dans un document adressé à la Cour suprême, elles assurent qu'un verdict favorable à Apple aurait " un impact dévastateur " car il ouvrirait la voie à une " vague de procédures judiciaires ", notamment lancées par des " patents trolls ".
DEUXIÈME AFFAIRELa décision de la Cour suprême ne mettra cependant un terme aux procédures judiciaires entre les deux rivaux. En effet, une deuxième affaire est également en cours devant la justice américaine. Samsung a été condamné en mai 2014 à verser 120 millions de dollars à Apple. Ce verdict plutôt clément - le groupe à la pomme réclamait plus de 2 milliards de dollars - avait été annulé en février dernier par une Cour d'appel. Avant d'être rétabli début octobre. Cette procédure devrait encore se poursuivre pendant plusieurs années.
Pour les protagonistes, les enjeux sont désormais plus symboliques que financiers. Malgré ses victoires judiciaires, Apple n'a en effet jamais obtenu l'interdiction à la vente des smartphones de Samsung sur le sol américain. En 2014, les deux entreprises s'étaient ainsi entendus pour abandonner toutes les poursuites engagées hors des Etats-Unis. Ils ne sont pas le seuls. La vaste guerre des brevets que se livraient depuis des années les acteurs du secteur du mobile a quasiment pris fin avec la multiplication d'accords à l'amiable.
Photo: Mike Lau
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