Boulimique de lecture, tout y passe quand j’ouvre un magazine. Une fois épuisé les articles et les reportages, je n’hésite pas à m’attaquer au reste comme ceux qui après avoir vidé leur assiette, saucent méthodiquement avec un bout de pain ou bien suçotent avec délectation, les os de leur part de volaille.
L’horoscope, je n’y crois pas une seule seconde pourtant je suis incapable résister à sa lecture. Et comme je suis du dernier décan de mon signe, je jette aussi un œil au premier du signe suivant le mien. Au cas où l’astrologue se serait gouré dans ses calculs ? A ma décharge, disons qu’il est difficile de résister à une flatterie ou une gentillesse, ce qui très souvent est le cas des ces prévisions astrales. Même si l’on s’en défend, la nature humaine est ainsi faite… « L’être humain a besoin d’être flatté, sinon il ne devient pas ce qu’il est destiné à devenir, pas même à ses propres yeux » écrit Pär Lagerkvist dans son roman Le Nain.
Donc, l’horoscope c’est pour me faire plaisir. Pourtant ce que je préfère, c’est la page des petites annonces ; pas celles où l’on vend des trucs et des machins, mais ces annonces qui ressemblent à des bouteilles jetées à la mer avec un message, ces cris d’aide ou de désespoirs, chacun y verra la motivation qu’il veut dans ces quelques lignes où des inconnus recherchent un ami qu’ils n’ont plus revu depuis cinquante ans, ou bien un parent éloigné dont ils n’ont plus de nouvelles depuis une éternité. « Je recherche Bernadette, elle était vendeuse à la boulangerie de la place de la gare à Vitry en 1953 ; tous les matins j’y achetais mon pain au chocolat et elle me faisait un grand sourire, je n’ai jamais osé lui parler… » Qu’espère celui qui poste cette annonce aujourd’hui ?
On peut en sourire, on peut même en ricaner, mais on peut aussi en être très ému. Une vie entière s’est écoulée et à l’heure du bilan final, un souvenir qu’on croyait complètement oublié, un fait mineur, prend soudain une importance disproportionnée. Peut-être n’est-ce qu’une impression fugitive, passagère, mais tout à coup, celui qui a passé l’annonce, réalise ou s’imagine que sa vie aurait pu être toute autre s’il avait à l’époque, osé tenter sa chance avec Bernadette… Certainement est-il trop tard, mais qui sait ?