Le mot « aventure » est un terme technique essentiel du vocabulaire poétique médiéval.
Le terme '' aventure '', par lequel le chevalier définit l'objet de sa quête - et ce faisant, il se définit lui-même :
« .. Je suis, dit-il, un chevalier en quête
de ce qu'il ne peut trouver;
car je cherche et rien ne trouve.
- Et que voudrais-tu trouver ?
- Aventurer pour éprouver ma prouesse et ma hardiesse.
Donc je te prie, te demande et t'implore,
si tu le sais,
de me conseiller une aventure ou une merveille.
- De cela, dit-il, tu te passeras : je ne sais rien de l'aventure et jamais je n'en ai entendu parler. »
Le chevalier au Lion - (Yvain, v. 358-369)
Le terme ' aventure ' a à faire avec ''la merveille'' ( ou d’aventure ou de mervoille ) et qu'il devra servir de preuve pour le courage d'Yvain.
Cependant on ne saurait comprendre la subtilité sémantique de ce passage si l'on ne se rappelle pas qu'en ancien français le verbe ''trover'' ne signifie pas simplement '' trouver '' ..( …) à l'origine c'était un terme technique du vocabulaire poétologique roman, qui voulait dire " composer de la poésie " et les poètes s'appelaient eux-mêmes trobadors en langue d'oc, trouvères en langue d'oil ou ou trovatori en italien.
Yvain, qui cherche ce qu'il ne peut trouver, pourrait être alors une évocation voilée de Chrétien de Troyes qui '' trouve '' l'argument de son poème: l'aventure du chevalier est l'aventure même du poète.
L'aventure est pour le chevalier autant rencontre avec le monde que rencontre avec lui-même et, de ce fait, source de désir et d'effroi.
Dans un lai de Marie de France, le protagoniste, après avoir rencontré la femme aimée, rentre chez lui en proie à un si grand trouble qu'il doute de lui et de ce qu'il a vu:
« Il pensait à son aventure
et doutant en son cœur
il est saisi d'effroi, ne sait que croire
et il ne lui paraît pas qu'elle soit vraie. »
(Lai de Lanval, v. 197 -2O0)
« Mais plus grande est la merveille
et plus risquée l'aventure,
plus il la désire et plus elle l'attire. »
(Érec et Enide, v. 5 644-5 646)
L'Aventure dans les romans de chevalerie désigne autant le hasard que le destin, autant l'événement inattendu qui met le chevalier à l'épreuve qu'un enchaînement de faits qui se vérifieront nécessairement.
« L'aventure qui doit être
il ne peut se faire qu'elle ne soit,
et ce qui doit arriver
pour rien au monde ne peut manquer. »
(Roman de Rou, v. 5609-5612)
Sources : Textes extraits de '' L'aventure – de Giorgio Agamben '' Rivages Poche