Ana
Avenue de la désillusion
00000 Ici
Déshumanité
Rue de l’indifférence générale
00000 Partout et surtout pas ailleurs
A toi, déshumanité désenchantée qui est triste témoin de la vie qui s’en va, qui s’en vient, des Hommes qui n’attendent rien ou leur train.A vous, cadres dans la finance, dans la banque ou les assurances, qui vous assurez d’avoir toujours plus de zéros sur votre compte et de chevaux sous le capot. A vous, privilégiés qui évoluez dans des hautes sphères que le bas monde que vous méprisez tant ne connaîtra jaais. A vous, décideurs pour tout un peuple, décideurs de rien pourvu que cela change quelque chose, décideurs de tout pourvu que ça vous profite. A toi, employé fictif mais seulement fiscalement qu’on crèvera à la tâche, trop bien exploité mais trop peu payé. A vous, hautes castes, bien pensants, cultivés qu’ils disaient, à vous dans toutes vos largesses, dans tout votre égoïsme, dans toute votre exhibition médiatique.
Loin de vous haïr, je me contrefous de votre sort. Vous, qui vous croyez supérieurs à qui? Vous, messieurs, mesdames, qui vous sentez supérieurs à vous seuls savez quoi, vous me débectez.
A toi, petite employée de bureau
A vous, indifférents, faussement aveugles, amoureux de vos écrans
Loin de vous haïr, votre sort m’indiffère. Vous, dans toute votre banalité, dans tous vos conflits intérieurs, dans toute la beauté de votre vie bien platement tumultueuse, vous m’êtes égaux.
A toi, souriant sans abri. A vous, déprimés, opprimés, supprimés. A vous, catalogués profiteurs, éternels glandeurs que les politiques n’en finissent plus de blâmer, d’accuser des maux du siècle. A vous, présumés assistés à l’existence bien plus dorée que ce que vous parvenez selon certains à voler à la société française et aux honnêtes gens qui travaillent. A vous, étrangers qui foulez sans l’ombre d’une gêne la France, qui n’appartiendrait qu’à une poignée de gaulois qui n’en sont pas. A vous, sans abris du monde, qui cherchez la chaleur des lieux abrités du vent les jours de grand froid et celle des sourires les autres jours. A vous, pauvres et dépourvus de tout sauf d’humanité et de solidarité.
Loin de vous haïr, j’ai pour vous la plus profonde sympathie. Vous, qui connaissez la galère, les difficultés de la vie quotidienne, qui surnagez.
A toi, qui soulève chaque jour des montagnes. A toi, qui brave le mauvais temps et le froid, qui accepte de sacrifier pour quelques heures la chaleur et le confort de ton logement pour apporter à une poignée de personnes un repas chaud ou une couverture. A toi, bénévole au gilet reconnaissable entre mille, qui te démène pour rendre la vie de quelqu’un meilleure. A toi, qui donne sans compter, qui n’hésite pas à consommer plus pour rendre service aux autres. A vous, qui protestez en disant que vous aimeriez qu’on vous aide si vous étiez dans une telle situation. A vous, qui vous battez pour un monde résolument meilleur. A vous, qui offrez des sourires.
Loin de vous haïr, je vous admire. C’est grâce à vous que le monde tourne encore un petit peu rond, grâce à vous que je n’ai pas encore perdu espoir en l’humanité, et pourtant…
A toi, deshumanité désenchantée. Sache que tu as encore quelques opposants, et qu’il existe encore quelques âmes charitables qui osent se dresser face à toi. Sache que tu peux te faire de vieux os, sache que nous ne lâcherons pas une miette. A toi, deshumanité désenchantée, attend-toi à ce que l’humanité se rebiffe, se donne la main, s’unisse et se ligue contre toi. Encore une fois, peut-être la dernière fois.