Un petit interlude dans ma série Paul Auster. Dédié à mon ami Francis de la rue des Rosiers. C'est lui qui m'a prêté Troquets de Paris, le recueil de chroniques de Jacques Yonnet, que je viens juste de finir. Je pensais donc, hélas, en avoir terminé avec ce truculent serviteur de la cause bistrotière. Par bonheur je me trompai, l'homme a de la malice posthume à revendre. L'autre jour, en scrutant à la loupe, comme je ne l'avais pas fait depuis longtemps, les programmes de France-Culture, je tombe à la date du lundi 27 février sur deux lignes au bout d'une nuit, pas n'importe laquelle, il faut bien dire, puisque c'était la nuit spéciale de La France mystérieuse :
Je ne me suis pas levé à 5 : 44 pour écouter l'émission, il ne faut pas exagérer, mais j'ai cherché le lendemain sur le site de la radio. C'était bien mon Yonnet préféré qui devisait avec Gilette Ziegler, auteure de Histoire secrète de Paris, et un journaliste de l'époque sur les alchimistes parisiens, le petit homme rouge des Tuileries, le Vieux d'après minuit, et autres légendes urbaines qu'on retrouve pour la plupart dans son livre, La Rue des maléfices.
C'était un grand plaisir, après l'avoir lu si longtemps, d'entendre sa voix, sa diction précise, sa façon tranquille de raconter des histoires à dormir beaucoup où l'on ne sait trop ce qui relève de la fable ou de la réalité. Et quel clin d’œil aussi à ce projet-ci de voir qu'il s'agissait d'une reprise, et que la première diffusion avait eu lieu le 1er octobre 1967, à cinquante ans de là. Ah la grande année !
Et, cet après-midi, filant vers Badecon pour enregistrer une voix pour un projet à venir, je tombe, toujours sur France-Culture, sur un autre des invités réguliers de ces chroniques, à savoir l'astrophysicien Aurélien Barrau. C'était dans l'émission de Patrice Martin, La Méthode scientifique.
La ruée vers l'eau, cela n'aurait pas forcément plu à Yonnet, qui préférait de loin la ruée vers le picrate, le pivois, le pichtegorne, le casse-pattes, l'antidérapant, le brutal, le rouquin, le petit velours et j'en passe (extrait d'un inventaire d'une chronique du 21 avril 1973). C'est chez lui, en tout cas, que j'ai retrouvé trace d'un mot que j'avais récemment déniché au jeu du dictionnaire, et que personne ne connaissait plus : mélécasse. Et qui désigne donc un rhum ou une eau-de-vie mêlée avec du cassis. Le dico utilisé (pourtant récent) donnait cet exemple : Garçon, un mélécasse !
Allez donc crier dans un bistrot aujourd'hui : Garçon, un mélécasse !