Le rejet du populisme, cette idée fixe de la gauche de salon partagée par François Fillon, consiste à fuir le peuple en colère.
Par Ivan Rioufol
Le rejet du populisme, cette idée fixe de la gauche de salon partagée par François Fillon, consiste à fuir le peuple en colère. Cette débandade est une faute lourde. Elle est au cœur de la crise démocratique. La lâcheté est de refuser d'écouter les plaintes des plus touchés par la mondialisation, de peur d'avaliser des constats du Front national. Cela fait quarante ans que les sujets dérangeants sont mis sous le tapis, pour ne pas " faire le jeu de l'extrême droite ". Résultat de ce ménage de souillon : non seulement le FN est en tête dans les sondages pour le premier tour, mais l'abstention représenterait, à ce jour, 32 % des intentions (étude Cevipof). Plus de la moitié de l'électorat ne jouerait plus le jeu des appareils politiques, effarés devant les Oubliés. Ceux qui proclament vouloir combattre l'extrême droite en profitent pour maltraiter un peuple jugé infréquentable. Ce mépris pour des Français trop français finira mal pour les prolophobes.
" Populiste " est une accusation qui interdit la critique du Système asphyxié. Le procédé veut clouer le bec, comme le procès en islamophobie est destiné à laisser l'islam politique en paix. Une même pensée intolérante, confrontée à ses échecs, use de l'invective pour se protéger. La violence de l'humanitarisme n'est certes pas comparable à celle de l'islamisme, qui peut tuer pour soumettre. Quand Clémentine Célarié refuse de serrer la main de Florian Philippot, samedi soir sur France 2, l'insulte dévoile le sectarisme de l'actrice et du show-biz. Mais la haine se fait déjà plus guerrière chez Christiane Taubira qui a qualifié, lundi, les responsables du FN d'" ennemis de la République et de la démocratie ". Les idéologues du vivre ensemble et de la charia ont en commun d'être convaincus de détenir la vérité. Les premiers sont même devenus les " idiots utiles " des seconds, devant qui ils ont déjà rendu les armes. Entre doctrinaires, on se comprend.
Si le populisme est un danger, c'est pour le politiquement correct qui s'est consolidé sur le déni des réalités et l'intimidation morale. Ce conformisme tyrannique cousine avec la pensée totalitaire, qui fait obstacle à l'usage de la raison et de la démocratie. En fait, le populisme n'est autre qu'une parole libre et réaliste. L'assimiler à une démagogie revient à confondre le peuple et la foule. Le premier est en haut, la seconde est en bas, nous a appris le vieil Hugo. Combattre le populisme en prétextant y voir l'extrême droite amène à museler la parole, à obscurcir le regard. C'est sous la pression du populiste Geert Wilders que le gouvernement néerlandais a tenu tête aux agressions verbales du sultan Erdogan et a retrouvé la confiance des électeurs.
L'opération de déstabilisation contre Fillon a toutes les caractéristiques du procès moral dont la gauche est friande. L'offensive est soutenue par François Hollande, qui a réclamé mercredi " l'exemplarité " des candidats. Le PS a même demandé le " retrait " du Républicain, en dévoilant bêtement ses motivations. Pour les donneurs de leçons, l'insinuation vaut accusation. La rigueur du droit ne compte pas davantage que la présomption d'innocence ou le secret de l'instruction. Cette semaine, Le Canard Enchaîné et Le Monde en rajoutent dans les accusations unilatérales. Cette pratique stalinienne est habituelle chez ceux qui craignent la voix des urnes. Le mécanisme s'emploie à ne promouvoir que des opinions tièdes et élastiques. Emmanuel Macron, cheval de Troie du hollandisme, a donné, lundi soir sur TF1, un bel aperçu de la pensée creuse. C'est pourquoi, quand Fillon s'en prend au populisme ou à " l'imprévisible " Donald Trump, il avalise ses justiciers, qui disent la même chose. Or il ne peut oublier que seul le peuple pourra peut-être lui venir en aide.
Fillon : remonter la pente
Oui, Fillon peut encore espérer remonter la pente. Il a déjà entrepris de dénoncer, hier, une " machination " qui reste à étayer. La démission, mercredi, du ministre de l'Intérieur, Bruno Le Roux, soupçonné d'emplois parlementaires fictifs dont auraient bénéficié ses enfants alors mineurs, n'enlève rien au stratagème destiné à faire gagner Macron, très majoritairement rallié par la gauche. C'est en assumant une démarche lucide, populiste en somme, que le candidat libéral-conservateur peut espérer reconquérir un électorat choqué par son goût pour l'argent, mais qui attend prioritairement des réponses aux insécurités économiques et culturelles. Les politiques vont devoir se faire à l'idée neuve d'une société civile qui a choisi d'en finir avec les concubinages entre les politiques, les médias et les juges. C'est parce que cette caste juge " nauséabonds " les problèmes posés par l'immigration ou l'islam qu'il faut justement les résoudre. Une enquête du CNRS montre (Le Figaro, mardi) que 44 % des élèves musulmans pensent qu'il est acceptable " dans certains cas " de " combattre les armes à la main pour sa religion ". Continuer à dormir ?
Quand Mélenchon dit vouloir être " le président de la paix ", il oublie les errements de la gauche pacifiste des années 1930 face au nazisme. C'est dans ses rangs que se recrutèrent beaucoup des " collabos " de Vichy. Or ce même processus s'est enclenché chez les nouveaux angéliques, rejoints par une extrême gauche fascinée par l'islam révolutionnaire et sa haine de l'Occident. L'Europe en guerre est un thème qui aurait dû être central lundi. Or, seuls François Fillon et Marine Le Pen ont abordé ce défi du siècle, qui a encore frappé Londres mercredi (3 morts, 40 blessés). Inutile de chercher plus loin les causes de la désespérance d'électeurs confrontés à la légèreté de dirigeants incapables de désigner l'ennemi et ses alliés. " Plus l'ennemi islamiste nous tue pour ce que nous sommes (...) plus on lui déclare la paix ", fulmine Alexandra Laignel-Lavastine *. L'essayiste salue le choix de son fils, parachutiste, de renouer avec l'homme du sacrifice et la figure du combattant. Les droites sauront-elles être à la hauteur de l'Histoire ?
Le tweet de Hollande
Ce tweet de Hollande, du 18 mars : " Aujourd'hui, ma fierté est de pouvoir remettre à mon successeur un pays plus fort, plus digne, plus soudé, plus cohérent qu'en 2012. " Quand un pouvoir épuisé mêle en si peu de phrases le mensonge à l'irréalisme, il est urgent qu'il s'en aille, et ses héritiers avec.
IVAN RIOUFOL
Du même auteur:L'union des droites pour éviter l'échec
* Pour quoi serions-nous encore prêts à mourir ? Éditions du Cerf.
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Ivan Rioufol pour Le Figaro.
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