Nous sommes toujours dans l'octave de Pâques et nous ne résistons pas à vous faire revenir en arrière, dans la semaine sainte, le vendredi saint exactement. Pourquoi ? Parce que nous sommes sous l'empire d'un sermon, d'un livre prêté, il ne date pas d'hier, il a été achevé d'imprimer en 1890. C'est un extrait. Mais j'arrête là pour l'instant la présentation, vous donnant à lire cette pensée humaine remplie de l'Esprit Saint (nous sommes au Calvaire).
"Tous donc l'outrageaient; mais dans ce concert d'insultes, les voix que je suis le plus surpris d'entendre, ce sont celles des malfaiteurs. Quoi ! eux aussi, ils s'unissent à la foule! Et qu'ont-ils à attendre d'elle ? Pour elle, eux aussi sont des objets de mépris. Ils s'unissent à elle contre Jésus-Christ. Et quel mal leur a-t'il fait ? Que signifie cette barbare et hideuse forfanterie et comment l'expliquer ?
Elle ne s'explique que trop, mes frères; la souffrance a ses tentations; plus elle est méritée, plus elle conduit au murmure, et du murmure au blasphème il n'y a souvent qu'un degré. Ces hommes sentent approcher leur fin...la terre n'a plus rien à leur donner. Rien devant eux que les tortures d'une affreuse agonie, et leur désespoir s'exhale en colère. C'est Jésus qu'ils maudissent, parce que Jésus s'est appelé le Sauveur et qu'il est incapable de se sauver lui-même, en descendant de sa croix. Ils ne savent pas, les insensés, que s'il y reste, c'est pour sauver leur âme.
Comment ne pas songer ici, sans que le cœur se serre, à tous ceux que le douleur endurci ? La douleur, elle devrait être la messagère qui conduit à Dieu; c'est dans la douleur que nous apprenons à connaître le monde et nous-mêmes; en brisant nos forces, elle nous fait sentir notre absolue dépendance; en troublant nos fausses joies. C'est aussi aux affligés que l'Evangile adresse ses meilleures promesses. Et pourtant combien y en a t'il qui le comprennent ? Que de fois au contraire elle ne fait que provoquer la révolte !
Vous aviez cru que ceux-là aimeraient naturellement Jésus-Christ qui avaient le plus besoin d'être consolés; vous aviez cru que ceux-là appeleraient le plus vivement le Libérateur qui gémissaient le plus sous l'oppression de la misère, que ceux-là soupireraient le plus ardemment après le vraie patrie qui n'avaient pu trouver une place au soleil d'ici-bas, que ceux-là auraient le plus besoin d'une éternelle affection dont le cœur avait été le plus ulcéré sur la terre. Dans la défection des âmes qui se tournent contre Jésus-Christ, il vous semblait que les affligés du moins devraient lui rester fidèles, car qui a eu, pour eux, comme lui des trésors de sympathie, qui a mieux su leur adresser les paroles de la vie éternelle, qui comme lui s'est chargé de leurs douleurs ?...Eh bien, vous verrez souvent la douleur révoltée et blasphémant, vous verrez les cœurs aigris de railler de l’Évangile et de ses promesses, opposer à tous nos appels je ne sais quelle sombre et navrante ironie, et tourner en dérision les paroles les plus tendres de l'amour divin...Malheureux, et où donc iront-ils, s'ils repoussent Jésus-Christ, et qui les consolera, s'ils méprisent les paroles du divin Consolateur ? Oui! Malheureux et insensés, car il se lève quelque prophète du néant qui leur dise que le ciel est vide, que la prière est un vain cri auquel rien ne répond, que tout marche au hasard, que tout finit pour l'homme dans la pourriture de la fosse, vous les verrez, Ô douleur ! courir à lui, l'acclamer, l'appeler leur ami, leur libérateur, et trouver que je ne sais quelle affreuse joie dans la lugubre perspective d'une nuit sans réveil; fidèle commentaire de cette parole de mon texte: "Ceux qui étaient crucifiés l'outrageaient aussi."
la suite demain avec le bon larron