Anne Teyssiéras | [Nos doutes étaient comme l’écume de la mer]

Publié le 29 août 2017 par Angèle Paoli

[NOS DOUTES ÉTAIENT COMME L'ÉCUME DE LA MER]

N os doutes étaient comme l'écume sur la mer, répandue partout, étalée, allant et venant sur le sable gorgé de coquilles et de mousse.

Notre anxiété était pareille à une nuée de criquets, si dense qu'elle voilait un moment le soleil et s'abattait dans un grand bruissement métallique sur les cultures et les jardins.

Attachés aux jeux de la mort, la vague, la nuée, le vent tirant par les cheveux ce qui encombre son passage, renversant, entraînant, navrant, déracinant...

L'un de nous intervenait : " Cessons de dire comment nous ressentons les choses, cela ne peut faire que les retourner. " L'une d'entre nous ajouta : " Écrire est dangereux. Les métaphores donnent de l'air mais font des trous dans la pensée. Il faut raccommoder les trous, colmater les brèches, combler les sillons pervers que font les images. En pure perte d'ailleurs. Nous n'échapperons pas à notre destinée. "

Anne Teyssiéras, Un présent sans mémoire, 42, poèmes, Revue NUNC | Éditions de Corlevour, 2017, page 51.