Extrait du recueil "Un certain climat".
+ Le dessinateur satirique René Pétillon a déclaré au magazine "Bretons" (août-sept. 2017) prendre bientôt sa retraite du "Canard enchaîné" ; à vrai dire il pourrait s'agir d'une "retraite de chanteur", avec de nombreux "come backs". Extraits de l'entretien accordé à cette publication identitaire où Pétillon a le culot de déclarer qu'il rêvait plutôt de travailler pour "Charlie-Hebdo".
- Je n'ai pas candidaté [au "Canard"], ce sont eux qui sont venus me chercher. (...) Au tout début des années 1990, je commence à renouer avec le dessin d'actu dans VSD. C'est là que "Le Canard" me repère. Eric Emptaz, rédacteur en chef, me demande de le rejoindre. Il voulait un strip.
- Nous sommes une dizaine de dessinateurs. Moi, je suis salarié. Mais nous ne le sommes pas tous. Cabu, par exemple, ne l'était pas. Quand vous l'êtes, vous réservez l'exclusivité de vos dessins politiques au Canard. (...) Ils tiennent à l'exclusivité de la signature. Je le comprends tout à fait : en tant que salariés, nous sommes très bien payés et bénéficions de tous les avantages : intéressement, participation, etc. Il est logique qu'ils aient leurs exigences.
- L'humour est incompatible avec le militantisme. Nous, dessinateurs de presse, sommes des tordus. Nous dessinons toujours contre. Le militantisme et l'engagement ont sans doute des vertus admirables. Mais il y a toujours, là-dedans, une dose de sectarisme et un certain caporalisme.(...)
Johnny Hallyday, un bel exemple de culture laïque (le chanteur sert ici de modèle au dessinateur Jijé)
+ De nombreux caricaturistes et titres de presse satiriques revendiquent les "valeurs républicaines laïques". A ce compte-là, on pourrait aussi bien créer une chaire pour enseigner la satire à la Sorbonne !
La République française et la laïcité sont-elles particulièrement favorables à la caricature ? Pas plus que le régime de Louis XV, et probablement moins que le Royaume-Uni voisin où une poignée d'intellectuels imposera plus difficilement au reste du pays son opinion qu'il peut le faire en France, par le canal médiatique.
A l'étranger, la prétention des Français à défendre la liberté d'expression mieux que quiconque prête d'ailleurs à sourire.
La presse satirique a connu son âge d'or au XIXe siècle, sous le régime monarchique libéral de Louis-Philippe. Les profs laïcs eux-mêmes ont du mal à soutenir que le régime républicain est favorable à la caricature ; à mots couverts, D. Moncond'huy dans sa "Petite histoire de la caricature de presse en 40 images" (Folio) écrit le contraire : "Gageons que le recul relatif de la satire de presse, à sa manière, constituait un signe de l'affermissement de la République elle-même." Notons qu'il est nécessaire d'employer une litote pour dire que la République moderne est hostile à la caricature.
Les Français sont parfois fascinés par le droit (les moins fascinés d'entre eux sont ceux qui connaissent le mieux l'appareil judiciaire et ses limites). Mais c'est l'esprit le moins disposé à la satire qui assimile la réalité au droit, et le droit à la réalité. C'est là une tournure d'esprit équivalente au fanatisme religieux, qui attribue au fantasme une valeur supérieure à la vie.
+ Retour sur le SoBD (salon de la BD indépendante) qui s'est tenu le week-end dernier à la Halles des Blancs-Manteaux (Paris 5e) : j'ai bien écouté les explications du libraire (spécialisé dans la BD) Sylvain Insergueix, et j'en déduis que le métier de libraire et les librairies n'ont désormais plus aucun intérêt, autre que commercial.
+ Il apparaît d'autre part que la "reconnaissance de la BD" par les autorités culturelles est comparable au label rouge en charcuterie, puisque les auteurs sont les derniers à en profiter, comme les cochons de leur label - sans compter les lecteurs, cinquième roue du carrosse.
+ Petit éditeur indépendant (éditions "Lapin") depuis quelques années, après avoir monté un site internet diffusant de la BD gratuitement, Philippe Simon a expliqué qu'il était plus habitué à gérer des dettes que des bénéfices. De plus, son domicile est rempli de cartons de livres ; malgré ces inconvénients, celui-ci à encouragé les passionnés à se lancer dans l'aventure. Son catalogue compte désormais une centaine de titres.
+ Le prix "Papiers Nickelés" a été décerné au cours du SoBD à "Case, strip, action !", un copieux ouvrage qui étudie les feuilletons en BD parus dans les magazines pour la jeunesse de 1946 à 1959 (Alain Boillat, Marine Borel, Raphaël Oesterlé, Françoise Revaz (éd. In-Folio).
+ Olivier Tallec, formé à l'école Duperré, est illustrateur de livres pour enfants et publie aussi des dessins humoristiques.
Sempé et Voutch sont ses références, ainsi que le "New-Yorker", et dans un entretien au site d'actu "Toutenbd" il explique sa méthode pour concevoir un gag.