«La France liée par le politiquement correct»

Publié le 29 décembre 2017 par Observatoiredumensonge

L'élection d'Emmanuel Macron a favorisé la tyrannie des minorités qui exigent la culpabilité occidentale.



Par Ivan Rioufol

CHRONIQUE - L'élection d'Emmanuel Macron a favorisé la tyrannie des minorités qui exigent la culpabilité occidentale.
Un vœu pour 2018? Que le ridicule terrasse enfin les "antiracistes": ils rendent imbuvables les minorités décrétées intouchables. Ce week-end, le footballeur de l'équipe de France, Antoine Griezmann, a dû présenter ses excuses pour s'être grimé en basketteur noir des années 1980, portant une perruque afro ; il voulait honorer les Harlem Globetrotters. Une même polémique imbécile s'est abattue sur la nouvelle Miss France, Maëva Coucke, qui avait déclaré, défendant sa candidature: "Après une blonde, une brune, une Miss à la crinière de lionne, pourquoi pas une rousse". Avoir rappelé les cheveux crépus d'Alicia Aylies, à qui elle a succédé, a valu à l'élue rousse d'être accusée de racisme.
Le Monde de mardi a consacré aux "nouveaux militants de l'antiracisme" un article complaisant sur les stages racialisés interdits aux Blancs, sans y trouver à redire. La décision du gouvernement de revenir sur la nomination de la militante racialiste Rokhaya Diallo au Conseil national du numérique a suscité plus d'indignations que ses propos haineux dénonçant un "racisme d'État". Etc.

Ceux qui appliquent les droits de l'homme comme une religion se comportent en pyromanes : ni les individus ni les cultures ne sont interchangeables.

L'emprise du politiquement correct ne cesse de s'étendre. Cette année, des militants noirs ont exigé de débaptiser des lieux portant le nom de Colbert, accusé d'avoir favorisé l'esclavage. Ces justiciers miment les activistes américains qui déboulonnent les statues du général sudiste Robert E. Lee et instruisent le procès de Christophe Colomb. Dans la foulée, le mâle blanc hétérosexuel est devenu, aux yeux des néoféministes, un prédateur sexuel en puissance.
Une semblable présomption de culpabilité pèse sur la société d'accueil, accusée de n'en faire jamais assez pour les "migrants". La dialectique antiraciste considère l'islam comme la religion des faibles et le musulman comme le damné de la terre. Dans une tribune collective publiée samedi par Le Monde, des maires (dont Martine Aubry et Alain Juppé) renoncent à différencier les réfugiés officiels des déboutés du droit d'asile qui veulent rester sur le territoire. Ils écrivent: "Accueillir dignement les nouveaux habitants relève de nos responsabilités à tous." Et allons donc!
L'endoctrinement humanitariste, qui oblige à accueillir qui veut et à céder à qui exige au nom de la diversité sacralisée, est une menace pour la cohésion nationale et la paix civile. Ceux qui appliquent les droits de l'homme comme une religion se comportent en pyromanes: ni les individus ni les cultures ne sont interchangeables.

L'entreprise de décervelage des "élites" est telle que l'opposition des autochtones à l'immigration de peuplement est vue comme un indéfendable repliement.

Jacques Toubon, le Défenseur des droits, promeut un angélisme sadique quand il déclare, mardi dans Le Parisien: "Il faut sortir de cette politique arc-boutée sur la maîtrise des flux migratoires", tout en admettant la "peur" des opinions européennes devant les arrivées d'étrangers. L'entreprise de décervelage des "élites" est telle que l'opposition des autochtones à l'immigration de peuplement est vue comme un indéfendable repliement.
Dimanche, le premier ministre, Édouard Philippe, a défini ce "réflexe populiste" comme étant "la flatterie des bas instincts". Les belles âmes sont odieuses: elles s'interdisent toute compassion pour les Français oubliés et s'offrent à leurs remplaçants.
Macron s'inscrit dans ce confort des bons sentiments, qui exigent la culpabilité occidentale. Son élection a signé la consolidation du politiquement correct, qui soutient la tyrannie des minorités. Candidat à la présidentielle, il n'avait eu de cesse de fustiger les "passions tristes" et les "esprits chagrins" qu'il disait voir chez les "forces du monde ancien" inquiètes de leur avenir dans leur pays ouvert à tous.
Le soutien de Macron à la désastreuse politique migratoire d'Angela Merkel, ajouté à ses éloges d'une société postnationale et ses attaques contre les "xénophobes" le placent dans le camp des immigrationnistes. Le thème de l'immigration, comme celui de l'islam, a d'ailleurs été absent de sa campagne, mais aussi du débat qui l'avait opposé à Marine Le Pen. Il n'en avait pas dit non plus un mot lors de son premier entretien télévisé en octobre. Dimanche, lors de sa conversation de salon avec Laurent Delahousse sur France 2, le sujet n'a pas davantage été évoqué. Le président s'est lié les mains.
● Macron face à l'immigration
L'émoi suscité cette semaine, dans la gauche socialiste et communiste, par les intentions prêtées au gouvernement de "durcir", à la rentrée, les conditions d'accueil des "migrants" et d'expulsion des déboutés de l'asile fait paraître Macron dans un rôle qu'il n'a pas préparé. "Je fais ce que j'ai dit", aime à répéter le président. S'il devait être pris au mot, l'impératif de la non-discrimination, pierre angulaire du politiquement correct, devrait le dissuader d'avoir à distinguer entre le réfugié politique et le réfugié économique.
Il est vrai que son ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, semble assumer ce tri auquel se refusent totalement les associations humanitaires. Lundi, néanmoins, Collomb a souhaité voir ces organismes rester partenaires des pouvoirs publics. Mardi, il a symboliquement accueilli lui-même 25 réfugiés. Mercredi, il a renoncé à renvoyer les déboutés dans les pays de transit, pourtant qualifiés de "pays tiers sûrs". Le même jour, le premier ministre assurait vouloir maintenir "l'inconditionnalité de l'accueil", tout en marquant une fermeté apparente.

La faiblesse de Macron est de n'avoir pas compris à quel point l'immigration était un sujet explosif pour l'opinion, en France comme dans le reste de l'Europe

En juillet, il déclarait encore vouloir loger tout le monde "dignement", en préalable à toute décision d'expulsion. "Je ne veux plus personne dans les rues à la fin de l'année". Engagement intenable bien sûr. D'autant que le message a été compris comme une invitation à venir davantage.
L'intérêt de la nation serait évidemment de voir Macron se faire violence, en reconnaissant la légèreté de ses analyses sur les enjeux sociétaux. La stratégie présidentielle du "en même temps" est inapplicable quand il s'agit prioritairement de dissuader les malheureux de rejoindre le mirage européen. Macron saura-t-il se libérer de la mauvaise conscience instillée depuis des décennies par les fossoyeurs du peuple français? Les prochains mois le diront. Mais il semble peu probable que le président puisse déstabiliser la droite, qui se revendique décomplexée et libérée des pensées toutes faites.
● Censure du rire
Dernière victime des censeurs: le comique Tex, viré de France 2 pour une mauvaise blague sur les femmes battues. Aujourd'hui, un Desproges, un Coluche, un Le Luron seraient au chômage. Le politiquement correct est une dictature.
Joyeux Noël et bonne année!

IVAN RIOUFOL

Éditorialiste au Figaro