Lundi 15 janvier
11h : J’apprends qu’Angela Merkel et Martin Schulz sont arrivés à un accord : la CDU et le SPD vont donc gouverner ensemble. Ce qui se passe Outre-Rhin est quand même angoissant : on pensait que les égarements (doux euphémisme, je sais) des années 1930 et 1940 avaient vacciné définitivement l’Allemagne contre la tentation du fascisme et de la xénophobie et que la prospérité affichée du pays était une protection suffisante contre une montée significative de l’extrême-droite. Il n’en fut rien ; on avait oublié un autre facteur de succès de la bête immonde : la connerie humaine, qui n’a pas de frontières. Donc : comme ni les chrétiens-démocrates ni les sociaux-démocrates n’ont la majorité, les voilà obligés de s’unir pour que l’Allemagne ait un gouvernement et l’extrême-droite qui a fait son entrée au Bundestag ne manquera pas d’en faire un argument pour se présenter comme la seule force d’opposition… Il serait grand temps de se ressaisir !
12h : Je vous parlais dans un précédent épisode du saccage des terres de la ferme de Traon Bihan : je commençais à peine à décolérer (un peu) quand j’apprends de tristes nouvelles concernant la rue Saint-Malo, seule rue du vieux Brest à avoir survécu aux bombardement de la seconde guerre mondiale. En effet, non seulement la salle d’exposition de ce site historique a été vandalisée mais, en plus, la rue, qui accueille des événements culturels, va être bloquée pendant quatre mois par des travaux, qui plus est destinés à couler en mur de béton pour en remplacer un, en pierres, qui s’était écroulé… Voilà qui ne risque pas d’émouvoir Stéphane Bern pour qui le patrimoine se limite aux châteaux et aux cathédrales ! Les vieilles pierres sont prises en sandwich entre les casseurs sauvages et les casseurs légaux que sont les promoteurs… J’aimerais bien tout casser, mais les pouvoirs publics ont visiblement décidé de le faire à ma place !
13h : Je retrouve une amie, doctorante et chargée de cours à la faculté : en d’autres termes, non contente de travailler sur sa thèse de doctorat, elle donne des cours aux étudiants. J’entends déjà les connards professionnels me dire « il faut bien que les doctorants servent à quelque chose » ! Sachez donc, chers connards, qu’il est arrivé à cette jeune femme une mésaventure révélatrice de la situation délicate des doctorants chargés de cours : durant la correction des copies de partiels, elle est tombée sur deux copies particulièrement minables auxquelles elle donna, comme de bien entendu, de très mauvaises notes. Il se trouve que les étudiants concernés lui ont envoyé un mail pour lui demander la possibilité de s’en expliquer avec elle en particulier : jusqu’ici, on peut encore trouver leur démarche légitime, sauf que… Ils ont AUSSI envoyé un mail à la directrice de thèse de leur prof pour se plaindre de cette dernière ! Vous voyez maintenant pourquoi la situation des doctorants chargés de cours est délicate : c’est parce que leurs élèves savent pertinemment que leur prof et à peine plus âgé qu’eux et, surtout, qu’il est lui-même encore un étudiant qui est sous la responsabilité d’un autre prof ! Donc, mesdames et messieurs les connards, voilà à quoi servent les doctorants à la faculté : à encaisser les sales coups !
18h : Rentrant à la carrée, j’apprends que Les Grosses Têtes se font épingler par le CSA pour avoir ironisé sur le récent décès du fils du compte de Paris, handicapé mental et prétendant au trône de France – non, aucun lien de cause à effet. Quoique… Enfin, il n’empêche le pouvoir était moins regardant à l’époque où Bouvard balançait des vannes racistes et misogynes à longueur d’antenne ! De surcroît, il n’y a pas de quoi fouetter un chat, les comiques de la bande à Ruquier ayant moins tourné en dérision les handicapés mentaux eux-mêmes que le principe monarchique. Mais ce qui me chagrine vraiment dans l’affaire, c’est que ça va encore donner un prétexte à tous les beaufs du pays pour nous sortir leur litanie : « on peut plus rien dire, aujourd’hui Desproges et Coluche seraient censurés, gnagnagni et gnagna » ! Chers connards, Desproges et Coluche étaient des génies, eux ! Michèle Bernier et Elie Semoun, je les aime bien, d’accord, mais vous ne me direz pas que c’est la même pointure ! Quant aux remontrances du CSA, elles sont dues au comte de Paris lui-même qui a saisi l’institution : si vous tenez donc à la liberté de rire de tout, prenez donc les armes contre cette vieille baderne aristocratique, vestige d’un passé monarchiste qui devrait être révolu ! Oui, ça, c’est un élément de patrimoine dont la disparition, elle, ne me gênerait pas ! Ah, ça ira, ça ira, ça ira…