La réussite et les projets des autres me ramènent à mes propres échecs. Me regardant dans le reflet pluvieux d'une vitrine, je me dis qu'il serait peut-être temps de faire preuve d'un minimum de savoir-faire. Ce bon à rien qui me regarde doit bien être capable d'accomplir quelque chose d'un tant soit peu valable, d'époustouflant, d'explosif.
J'avais bien failli littéralement me vautrer en voiture, cette nuit, accélérant en prenant un virage. La sensation de vie qui se dégage des jambes qui tremblent était exceptionnelle, tant qu'il m'aurait plu qu'elle ne s'arrête jamais. La voiture qui s'emballe et vire de gauche à droite, le crissement des pneus, tout cela m'a retourné l'esprit en un seul instant, comme si les dieux, ou quelconque autre force supérieure (pourquoi pas même intérieure), m'offraient une chance supplémentaire.
Il en va d'une part d'orgueil qui se terrait dans les souvenirs de l'enfance. Vivre pour deux. En quelques sortes, venger leur disparition. Et de la même manière, parvenir à lui prouver que j'en vaux vraiment la peine, bien qu'apparemment il n'y en ait pas besoin. Et je me regarde et me désespère, ce jeu n'est même plus drôle, il va falloir le pimenter. Prendre réellement des risques. Accomplir, détruire, peu importe. Enfin devenir quelqu'un, que l'on serait fier de connaître, d'aimer, de haïr.
En me dédoublant je puis annoncer: "Dis-toi bien que tu n'es rien, strictement rien. A peine un fantôme."
Noir Désir "En route pour la joie"
"Qui a miné la base
qui a fait sauter l'pont
qui avait disposé
du ciment sous les plaines
qui savait au debut
qu'il y aurait une fin
qui êtes vous messieurs-dames
pour me parler comme ca ?
(...)
de l'os après la chair
de l'acide au rabais
jusqu'à en faire pourrir
les derniers noyaux frais"