Résumé de l’épisode précédent : Notre héros avait proposé des œuvres de son cru pour une exposition de peintures sur les croix et calvaires de
Samedi 10 février
14h : Pour se perdre dans Châtelaudren, il faut le faire exprès : la ville est vraiment petite et on en a vite fait le tour, même si le cadre agréable donne envie de s’y attarder. Après quelques pas dans les ruelles et quelques photos, le tout en gardant à la main le précieux butin que constituent mes œuvres fraichement récupérées, je me décide à me diriger vers la salle où aura lieu la vente aux enchères, histoire d’avoir de pouvoir m’asseoir et d’être sûr de ne pas me mettre en retard en vagabondant.
15h : Je n’avais encore jamais assisté à une vente aux enchères d’œuvres d’art. Quand on parle de ce type d’événement, on imagine spontanément un bourgeois de province imperturbable, bedonnant et vénérable, vêtu comme Achille Talon, assis derrière une tribune prestigieuse et assurant l’ordre dans une salle cossue remplie de singes hurleurs excités par la perspective d’une bonne affaire et sautant littéralement de leurs sièges pour proposer leurs prix. Oubliez cette image d’Epinal : vêtu d’un costume trois-pièces de petit cadre, le commissaire-priseur, monsieur Tugdual Borel (c’est pas gentil de se moquer des prénoms des autres) avait la calvitie des quadragénaires qui préfèrent se raser carrément la tête plutôt que voir leurs cheveux tomber, il était assis derrière une malheureuse table, dans une salle comme on en trouve dans n’importe quelle maison pour tous de chef-lieu de canton, et c’était lui qui était obligé de faire des pieds et des mains pour pousser à l’enchère une assistance passablement éveillée ! J’avais de la peine pour lui quand je le voyais s’astreindre à baisser les mises à prix pour motiver les acheteurs : il y eut sans doute autant d’enchères que « d’embaisses » ! Un dessin fut mis à prix 20 euros : comme je disposais précisément de cette somme (je n’avais pas mon chéquier), je me suis porté acquéreur, et comme personne n’a renchéri, c’est moi qui ai emporté le lot ! Si on m’avait dit que je ne rentrerais pas bredouille de cette vente, je ne l’aurais jamais cru ! Je n’ai pas compté, mais si la moitié des lots a trouvé preneur, c’est le bout du monde ! La cause était pourtant juste : les bénéfices de la vente étaient destinés exclusivement à une association qui répertorie les croix et calvaires de Bretagne et lutte pour la sauvegarde de ce patrimoine local. Bon, il faut être juste : il y a quand même eu quelques achats et l’asso n’est pas sortie les mains vides de cette expérience, mais ça m’étonnerait qu’il y ait une seconde édition. C’est surtout pour les artistes qui avaient fait le déplacement et qui ont vu que leurs œuvres ne trouvaient pas preneur qu’on peut avoir de la peine : rien que pour ça, je me réjouis presque que mes travaux n’aient pas été retenus…
20h30 : Après une heure passée à attendre le car et deux heures de route, trajet en train compris, me revoilà à Brest pour écouter Rodolphe Burger venu se produire au Quartz ; une approche créative et exigeante de la musique, rien de tel pour se nettoyer les oreilles souillées par les niaiseries que débitent les radios ! Mais c’est indescriptible. Après ça, j’ai regagné mon doux foyer : fin de l’escapade.
P.S. : Si vous êtes sensible à la sauvegarde du patrimoine, visitez le site de l’association organisatrice, « Croix et calvaires de Bretagne ».